L’Autorité de la concurrence a bloqué la fusion entre TF1 et M6, estimant, contrairement aux dirigeants des deux groupes, que leur part du marché publicitaire et de la distribution des chaînes aurait été démesurée. Avec un risque de hausse des prix pour le consommateur.
Faut il voir dans le rejet de la fusion TF1-M6 l’aveuglement de l’Autorité de la concurrence, méconnaissant les réalités de l’entreprise ?
Jean-Christophe Roda, professeur de droit privé, directeur du Centre de droit de l’entreprise, université Lyon-III : Il faut d’abord souligner que l’Autorité de la concurrence n’a pas formellement empêché la fusion. Elle a fait part, aux dirigeants de TF1 et M6, de conditions à la réalisation de ce projet qu’ils ont jugées inacceptables. Nous ne connaîtrons donc pas l’argumentaire précis de l’Autorité. Sur le fond, et en prenant toutes les pincettes nécessaires, la décision n’a rien de surprenant. L’Autorité de la concurrence a pris en compte la part de marché que détiendrait le nouveau groupe issu de la fusion, concernant la publicité et la diffusion via les fournisseurs d’accès à Internet. S’agissant de la publicité, la part de marché aurait atteint 70 %. C’est un véritable mastodonte de l’audiovisuel qui aurait vu le jour, au pouvoir de négociation accru, avec, pour conséquence, un risque de hausse des prix concernant la publicité ou la distribution des chaînes. Or, c’est bien ce risque que prennent en compte les autorités de la concurrence, dont la mission première est de défendre le consommateur. Et surtout, elles ne font pas de politique industrielle.
L’impact de l’arrivée de Netflix sur le marché de la publicité n’a-t-il pas été sous-estimé ?
Jean-Christophe Roda : Par définition, l’analyse des opérations de concentration suppose de se projeter sur les années à venir. Il s’agit d’évaluer ce que sera le pouvoir de marché d’un nouveau groupe, issu d’un rachat ou d’une fusion, et quelles seront les conséquences de ce pouvoir sur les prix. Donc, l’Autorité de la...