La Commission européenne vient de présenter mi-mai son projet de directive Debra visant à lutter contre les incitations fiscales favorisant l’endettement. Tire-t-elle ainsi les leçons de la crise ?
Amélie Nithart, fiscaliste chez CMS Francis Lefebvre : S’il existe au sein de l’Union européenne des règles qui incitent fiscalement les entreprises à recourir à l’emprunt en permettant, sous certaines conditions, une déduction des charges financières, il en existe très peu qui les incitent fiscalement à augmenter leurs fonds propres. Seuls six Etats (la Belgique, Chypre, Malte, l’Italie, le Portugal et la Pologne) ont déjà adopté au niveau national des règles de ce type. Or la Commission fait le constat, dans le préambule du texte, que les entreprises européennes se caractérisent en général par un poids de la dette trop élevé par rapport à celui des fonds propres, ce qui les fragilise notamment en cas de crise.
L’objectif de la directive est donc de leur permettre d’être plus résistantes face aux crises, ainsi que, pour les entreprises innovantes, de renforcer plus facilement leurs fonds propres. Debra ne constitue toutefois pas en soi une réelle innovation. En 2016, la proposition de directive ACIS (Assiette commune pour l’impôt sur les sociétés), à la portée plus large, comportait déjà une mesure équivalente de déduction des intérêts notionnels sur les fonds propres. Cette proposition ACIS étant abandonnée, Debra a le mérite de relancer ce sujet précis, en présentant d’ores et déjà un calendrier de mise en œuvre.
Les entreprises qui augmentent leurs fonds propres d’une année sur l’autre pourront bénéficier d’une déduction fiscale. Les modalités de la mesure sont-elles attractives ?
Amélie Nithart : Il faut d’abord signaler que le texte s’applique non pas aux variations de fonds propres, mais aux variations de fonds propres « nets », ces...