dossier spécial

Les rencontres Restructuration & Financement

Publié le 13 juillet 2023 à 10h17

 Temps de lecture 18 minutes

A l’heure du remboursement des prêts garantis par l’Etat (PGE), de l’inflation et de la crise géopolitique, l’année 2023 s’annonce plus mouvementée que 2022 sur le marché du restructuring. Bonne nouvelle toutefois dans ce contexte morose : selon le dernier rapport de l’Observatoire du financement des entreprises publié en mai dernier par la Médiation du crédit, 95 % des entreprises françaises auraient d’ores et déjà remboursé leur PGE. A l’occasion des rencontres Restructuration et Financement d’Option Finance qui se sont tenues le 20 juin dernier dans les salons de l’Hôtel des Arts & Métiers, les spécialistes du secteur ont fait le point.

Le financement de la réindustrialisation

Tous les secteurs de l’économie sont actuellement touchés par un mouvement de réindustrialisation et de transformation profonde. C’est tout du moins ce que constate Adeline Lemaire, directrice exécutive en charge des fonds de fonds chez Bpifrance. Le plan France 2030, tout d’abord, contient un important volet vert. Mais comment encourager les entreprises à investir dans la décarbonation lorsqu’elles subissent de plein fouet réductions de marge et inflation ? « La décarbonation n’est pas un luxe que l’on peut se payer lorsque tout va bien ; c’est justement le moment d’accélérer, affirme Adeline Lemaire. Mettre en place des plans d’action et des mesures de sobriété énergétique en revoyant l’ensemble de son modèle économique est un travail porteur à plus ou moins long terme, y compris au niveau économique. Nous avons la conviction que les entreprises qui sont accompagnées dans leur décarbonation aujourd’hui seront les actifs qui se revendront le mieux demain. » Un enjeu de performance, donc, de même que celui de l’innovation industrielle. A ce sujet, Bpifrance a annoncé, en 2022, avoir investi directement plus de 350 millions d’euros dans les entreprises industrielles innovantes dans le cadre du plan « Start-up et PME industrielles », au travers notamment de son fonds Sociétés de projets industriels (SPI) ou, sur la partie fonds de fonds, de son nouveau Fonds national de venture industriel. « Il s’agit de faire en sorte que les start-up, du prototype jusqu’à la première usine, puissent trouver un accompagnement professionnel en fonds propres pour poursuivre leur développement », commente Adeline Lemaire. Celle-ci évoque également l’activité de Bpifrance dans le fonds de fonds de retournement, pour l’heure assez « marginale » en termes de volume. « C’est un segment qui a toutefois vocation à se renouveler, avec de nouvelles équipes de gestion ou via le renforcement d’équipes de gestion existantes qui peuvent se réinventer », conclut la directrice exécutive.

«La décarbonation n’est pas un luxe que l’on peut se payer lorsque tout va bien ; c’est justement le moment d’accélérer. »

Adeline Lemaire Directrice exécutive en charge des fonds de fonds ,  Bpifrance

Quand le remboursement des PGE devient un enjeu

Entre mars 2020 et juin 2022, près de 700 000 entreprises ont bénéficié d’un prêt garanti par l’Etat (PGE) pour un montant d’environ 145 milliards d’euros. Mais selon le dernier baromètre publié par Bpifrance, Le Lab et Rexecode, 9 % des TPE-PME interrogées craignent de ne pas être en mesure de le rembourser.

Avec de gauche à droite : Nathalie Rehby, directrice générale, Satellitis, qui animait le débat, Pierre-Olivier Chotard, secrétaire général du CIRI, sous-directeur adjoint en charge du financement des entreprises, Direction Générale du Trésor, Ségolène Coiffet, avocat associé, De Pardieu Brocas Maffei, Benoît Desteract, président, ARE - Association pour le retournement des entreprises, Jacques Fineschi, président, Tribunal de Commerce de Nanterre, Franck Kelif, directeur général, Perceva

Avec un nombre de faillites qui repart à la hausse et dans le contexte actuel, le remboursement des PGE représente un enjeu important pour les entreprises françaises qui en ont bénéficié lors de la pandémie. « Les difficultés surviennent surtout pour les entreprises qui n’étaient déjà pas en très grande forme au moment de la crise sanitaire, et qui cherchent à restructurer leur endettement de façon générale » observe Ségolène Coiffet, associée chez De Pardieu Brocas Maffei. Pierre-Olivier Chotard, secrétaire général du CIRI, souligne pour sa part l’immense succès rencontré par les PGE depuis leur lancement, et la possibilité pour les entreprises de continuer à lever les PGE Résilience jusqu’en décembre prochain. « Par ailleurs, les PGE rencontrent aussi un succès dans leur remboursement : sur 145 milliards d’euros déployés, environ 50 milliards ont déjà été remboursés et nous n’enregistrons des pertes que pour 1,5 % de l’encours », souligne-t-il.

Anticipation

Pour le peu d’entreprises en défaut, Pierre-Olivier Chotard l’assure : des solutions existent, comme le rééchelonnement ou la renégociation. « Si le montant représente moins de 50 000 euros, il est possible de faire appel au médiateur du crédit, sinon l’interlocuteur sera le conseiller départemental à la sortie de crise qui peut orienter soit vers le médiateur du crédit, soit vers le tribunal de commerce », précise Jacques Fineschi, président du tribunal de commerce de Nanterre ; lequel indique que sur les cinq premiers mois de 2023, le tribunal a ouvert 86 conciliations et mandats ad hoc, dont la plupart comportaient un volet PGE. Une véritable explosion sachant que sur toute l’année 2019, seuls 50 dossiers avaient été ouverts. « Depuis deux ans, nous constatons une forte augmentation des procédures amiables, souvent liées au remboursement des PGE » indique de son côté Benoît Desteract, président de l’Association pour le retournement des entreprises (ARE). « Cela va dans le bon sens, car cela oblige les gens à anticiper. » Des dirigeants qui s’y prennent donc de plus en plus tôt, comme le constate également le directeur général de Perceva, Franck Kelif. « Il y a actuellement peu de défaillances car les PGE ont été relativement bien calibrés et ce sont des entreprises relativement saines qui en ont bénéficié. Concernant les remboursements, cela va être un sujet au cas par cas », ajoute-t-il.

Négociation ou conciliation ?

Les intervenants tiennent en outre à briser les idées reçues sur les durées maximales de remboursement. « Il faut les adapter à la réalité actuelle des entreprises, affirme Franck Kelif. Pour cela, il faut encourager les discussions amiables avec les banques pour un éventuel aménagement, si possible dans la période initiale des six ans, et ne pas mettre tout le poids de la négociation sous l’égide du tribunal lorsque cela n’est pas nécessaire. » Un avis partagé par Jacques Fineschi, pour qui une négociation directe entre banques et dirigeants est toujours à privilégier, notamment lorsque le problème concerne uniquement un PGE. « La conciliation est en revanche préférable lorsque la restructuration financière est particulièrement complexe, ou bien lorsqu’il existe des difficultés contractuelles avec certains fournisseurs, clients et bailleurs », explique-t-il. Concernant les banques, Ségolène Coiffet tient à rappeler que pour elles aussi, les PGE ont été une nouveauté en 2020. « Souvent, c’est dans l’objectif de ne pas perdre le bénéfice de la garantie de l’Etat que les établissements bancaires sont réticents à ne pas restructurer en dehors d’une procédure amiable », conclut-elle.

Droit de l’insolvabilité : bilan et évolutions

Adoptée en juin 2019, la directive européenne dite « Restructuration et insolvabilité » est entrée en vigueur en France le 1er octobre 2021. Près de deux ans plus tard, quels sont les premiers bilans et impacts liés à cette transposition ?

Avec de gauche à droite : Véronique Pernin, Ceo, Vp Strat qui animait le débat, Jean-Dominique Daudier de Cassini, avocat associé, Weil, Gotshal & Manges LLP, Céline Domenget Morin, associée, Goodwin, Benjamin Laurent, mandataire judiciaire, MJA Selafa, Christophe Thevenot, administrateur judiciaire, Thevenot Partners

L’harmonisation des différents droits nationaux. C’est ce qui, au départ, a donné lieu à la directive européenne dite « Restructuration et insolvabilité », transposée en droit français en 2021. « Il s’agit également de garantir l’accès à des cadres de restructuration préventive efficaces, complète Benjamin Laurent, mandataire judiciaire chez MJA. La philosophie de cette directive, c’est l’anticipation et la célérité, avec un but annoncé : éviter les liquidations inutiles et la perte de valeur qui en découle. » Parmi ses apports, la création de classes de parties affectées et des nouveautés telles que le test du meilleur intérêt, ou encore la hiérarchisation des créanciers avec des règles de priorité absolue. En décembre dernier, la Commission européenne a souhaité compléter le texte avec Insolvency III, avec l’idée que les faillites en Europe avaient un impact sur la circulation des capitaux. « Au plus tôt, nous pourrions avoir une directive adoptée fin 2024, mais cela dépend de plusieurs facteurs, commente Christophe Thevenot, administrateur judiciaire chez Thevenot Partners. Ce mouvement d’harmonisation est donc non seulement en marche, mais il s’accélère du côté de la Commission européenne. »

Réduire le passif

Selon Christophe Thévenot, quelques sujets de débat subsistent, tels que les comités de créanciers, le traitement des micro-entreprises ou encore l’introduction d’un processus de « prepack cession ». Intervenue en 2022, la restructuration du groupe Pierre & Vacances est un exemple réussi post-transposition. « Ce dossier représente l’aboutissement d’un prépack complet », indique Céline Domenget Morin, associée chez Goodwin. « Nous avons aujourd’hui une loi qui est excessivement puissante ; ce n’est pas un couteau suisse, c’est un couteau japonais, affirme pour sa part Jean-Dominique Daudier de Cassini, associé chez Weil, Gotshal & Manges. Dans certains dossiers, on va pouvoir ramener la valeur du passif à la valeur de l’actif et nettoyer tout ce qu’il y a au-dessus. Ensuite, le sort des actionnaires dépend soit du redressement judiciaire, soit de la sauvegarde. Il y a en quelque sorte une prime à aller vite et à présenter un plan à un actionnaire capable de remettre au pot. » Pour l’avocat, une notion notamment reste à éclaircir, à savoir celle d’insolvabilité. « Si l’on ne fixe pas de règles à ce sujet au moins, cela va devenir très complexe, met-il en garde. Le législateur doit revenir à des principes de base ; or, là, on est en train de s’en écarter. »

Outil de souveraineté économique

Parmi les autres points d’attention, le sujet des nullités de la période suspecte. « Il n’existe pas de référence à une quelconque notion de cessation des paiements, note Céline Domenget Morin. Il y a donc à la fois un aspect positif qui est d’essayer d’harmoniser le traitement de ces nullités par typologie d’acte, mais cette absence de référence est dangereuse en termes de sécurité juridique. » Pour l’associée, il est en outre essentiel de garder en tête que le droit reste un outil de souveraineté économique. « Cette directive est d’inspiration germanique sur un grand nombre d’aspects, analyse-t-elle. Il faut que les Français soient beaucoup plus présents au niveau des instances européennes pour pouvoir discuter de ces points très en amont. »

Protéger sa trésorerie dans la crise et trouver le cash de la relance

Malgré un Etat jugé « très accompagnant », comme en témoignent les PGE, les entreprises en difficulté se doivent de gérer leur trésorerie afin de maintenir une solvabilité et une liquidité suffisantes, et pour faciliter leur relance par la suite.

Avec de gauche à droite :  Mathieu Hongrois, CFO, Klaxoon, Yves-Alain Ach, administrateur, CNCEF qui animait le débat, Fabien Lecomte, directeur grands groupes & institutions, Allianz Trade

Depuis l’arrêt de l’économie en mars 2020, la France n’a cessé de traverser ce que Fabien Lecomte, directeur grands groupes & institutions chez Allianz Trade, appelle des « polycrises » qui ont perturbé l’activité de l’ensemble des acteurs économiques. « Cela a engendré des séquences qui se sont enchaînées, voire entrechoquées : problématiques d’approvisionnement, désorganisation des chaînes de valeur, pénuries ou encore problèmes de disponibilité de la main-d’œuvre et des ressources humaines », liste-t-il.

Changement de paradigme

La guerre en Ukraine, notamment, est venue amplifier le phénomène inflationniste. Face à cela, les banques centrales réagissent de différentes manières : « Si la banque centrale européenne a adopté une politique offensive, la Fed est un peu en pause. La Chine, quant à elle, a baissé ses taux directeurs, indique Fabien Lecomte. En Europe, nous sommes dans la même situation qu’en 2001. Certains secteurs commencent à subir cette décision, comme le bâtiment et la construction avec une problématique d’accès au crédit poussant les particuliers à reporter leurs projets. » Mathieu Hongrois, lui, est le directeur financier de la start-up française spécialisée dans l’édition de logiciels applicatifs Klaxoon, créée en 2015. Il note un changement de paradigme depuis début 2022, avec une demande de rentabilité qui revient au cœur du débat. Dans ce contexte, le directeur financier encourage à déclencher tous les modes de financement à court terme. « Si par chance vous avez des actionnaires, il faut les solliciter. Le premier financement court terme vient du haut de bilan et des actionnaires historiques, explique-t-il. Mon conseil est de faire en premier lieu des apports en compte courant, ou des obligations convertibles, puis de faire l’inventaire de ses actifs. Ensuite, sur la partie passif, il y a tous les tiers ; il est par exemple possible de se tourner vers ses fournisseurs en demandant des moratoires et un allongement des délais de règlement. »

Gérer en amont

Pour regénérer du cash, Mathieu Hongrois préconise de travailler sur son compte de résultat et de réduire sa structure de coût, que cela soit sur les effectifs ou sur les charges. « L’objectif est d’anticiper afin d’avoir accès à une procédure de conciliation, indique-t-il. Dès lors que vous êtes en état de cessation de paiements, la conciliation n’est en effet plus autorisée et on entre alors dans une logique de procédure collective ou de sauvegarde. » Fabien Lecomte observe à ce sujet une accélération notable des procédures préventives comme la conciliation, qui démontre une bonne gestion en amont. « Quoi qu’on en dise, l’accompagnement bancaire perdure aussi à l’heure actuelle, ajoute-t-il. S’il est plus difficile pour les TPE de solliciter des financements, pour les PME, les encours sont encore bien orientés. » Pour voir à plus long terme, le plan France Relance est doté d’un budget d’environ 50 milliards d’euros, dont environ 28 milliards sont mobilisés à l’heure actuelle, et France Industrie annonce des projets industriels structurants de relocalisation en France pour 2026. Le bout du tunnel ?

Retour d’expérience – Le retail : un secteur en reconstruction

Entre les effets de la crise sanitaire et une augmentation du coût des matières premières, de l’énergie, de la main-d’œuvre et des transports, le secteur du retail en France rencontre des difficultés inédites. Quelles en sont les principales raisons et quelles sont les possibles solutions ?

Avec de gauche à droite : Morgane Michel, juriste, PLM Avocats et membre du bureau, AJR qui animait le débat, Jean-Dominique Daudier de Cassigny, avocat associé, Weil, Gotshal & Manges LLP, Philippe Favre, président, Cassiopée Transformation, Florent Guintrandy, managing director, Ondra Partners

Cela n’a échappé à personne : de plus en plus d’enseignes de retail, notamment dans le prêt-à-porter, se sont récemment retrouvées en redressement ou en liquidation judiciaire. Outre l’arrivée de nouveaux intervenants sur le web – les pure players comme Asos ou Zalando, ou encore des marques avec un modèle économique de prix très bas telles que Shein –, les raisons sont avant tout conjoncturelles, avec depuis 2022 l’augmentation des coûts de revient et d’exploitation qui créent une forte baisse des marges. « Les entreprises n’ont pas pu répercuter ces augmentations dans leurs prix de vente » souligne Philippe Favre, président de Cassiopée Transformation. Par ailleurs, selon les résultats d’une étude partagés par le managing director de la banque d’affaires Ondra, Florent Guintrandy, 80 % des Français ont déclaré leur volonté de réduire leur consommation de textile cette année. « Cela n’est pas uniquement lié à la conjoncture économique ou à l’inflation ; il y a aussi le souhait de consommer moins et mieux », analyse-t-il.

Solutions de financement

Pour les entreprises en difficulté, quelles sont alors les solutions ? « On distingue le financement de bas de bilan du financement de haut de bilan, par fonds propres et à plus long terme, expose Florent Guintrandy. Si, pour le bas de bilan, les banques sont toujours présentes, pour le haut de bilan les acteurs qui investissent dans le retail en difficulté sont aujourd’hui avant tout les family offices et les investisseurs individuels. » D’un point de vue opérationnel, selon Philippe Favre, le crédoc peut permettre de financer et sécuriser les achats, le reverse factoring d’étendre les conditions de paiement lorsque l’on est face à un fournisseur européen, et la fiducie sur stock de financer l’activité d’entreprises en difficulté, malgré sa lourdeur et son coût. « Lorsqu’une société de retail commence à être en difficulté, il n’y a pas d’effet “buffer” et la crise arrive brutalement, fait remarquer de son côté Jean-Dominique Daudier de Cassini, avocat associé chez Weil, Gotshal & Manges LLP. La première étape est donc d’essayer de trouver des financements de courte durée pour pouvoir ensuite aller chercher des investisseurs long terme. Les principaux acteurs sont les assureurs crédit et les banquiers, mais il faut être assez dur dans la négociation. »

Susciter l’engagement

Pour l’avocat, il faut désormais faire preuve d’agilité dans les métiers du retail. C’est le cas d’Intersport, qui a mis la main sur Go Sport en mai dernier et que le cabinet Weil Gotshal accompagnait. « Ce qui permet de sauver des entreprises, c’est de travailler sur un plan et de regarder ses forces, indique l’associé. Chez Go Sport, c’était indéniablement l’implication du personnel. Il faut par ailleurs créer un esprit d’entreprise autour d’une valeur phare, à savoir ici le sport. » Philippe Favre conclut par une note d’espoir : le retail physique n’est pas mort. « Beaucoup d’entreprises du secteur continuent à s’en sortir, comme Beaumanoir ou encore Kiabi, sans compter le luxe qui va de record en record, souligne-t-il. L’entreprise de retail qui va s’en sortir est celle qui va susciter l’engagement de ses clients via ses produits, ses prix, son service ou son ambiance. L’expérience client est clé. »

Retour d’expérience – Groupe Pierre & Vacances – Center Parcs : une transformation réussie

Le groupe coté Pierre & Vacances – Center Parcs (PVCP), numéro 1 en Europe dans le domaine des résidences de loisirs, est un exemple réussi de transformation d’entreprise en difficulté. Retour sur les étapes de sa restructuration.

Avec de gauche à droite : Alexandre Le Ninivin, secrétaire général, TMA France animait le débat,  Joanna Rousselet, administrateur judiciaire, Abitbol & Rousselet, Franck Gervais, directeur général, Groupe Pierre Et Vacances – Center Parcs

Au moment de l’arrivée de Franck Gervais, directeur général de Pierre & Vacances – Center Parcs, à la tête du groupe spécialisé dans les résidences de tourisme en janvier 2021, la situation est catastrophique : une perte de plus de 800 millions d’euros de chiffre d’affaires et un endettement ayant doublé avec la crise sanitaire, passant à plus de 1 milliard d’euros. La restructuration est inéluctable. « En moins de 18 mois, il a fallu trouver 200 millions d’euros d’argent frais et un accord avec la majorité des propriétaires, et opérer un changement d’actionnariat et de gouvernance majeur », rappelle celui qui compare la situation du groupe à cette période au naufrage du Titanic.

Réinvention

En mai 2021, le groupe lance le plan stratégique « Réinvention », présenté notamment aux banques, aux propriétaires et aux potentiels investisseurs. « Il fallait les convaincre de participer à une nouvelle histoire du tourisme en Europe, axée sur des valeurs importantes lors de la crise sanitaire comme la famille, la proximité, la nature et les territoires, expose Franck Gervais. L’objectif était également d’aller jusqu’à 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires. » Les procédures amiables, qui se sont étalées sur une durée de 18 mois au total (conciliation, mandat ad hoc, conciliation puis procédure de sauvegarde accélérée), ont permis d’aller trouver de nouvelles sources de financement. « L’une des premières actions a été l’ouverture de discussions avec les établissements bancaires pour leur demander de mettre en place un nouveau PGE afin de couvrir immédiatement l’impasse de trésorerie, rapporte Joanna Rousselet, administrateur judiciaire chez Abitbol & Rousselet. S’ensuivront entre autres des négociations avec les bailleurs, puis des négociations avec les banques sur la restructuration de l’endettement. » Au final, un consortium formé par trois investisseurs (Alcentra, Fidera et Atream) accepte de remettre au pot. Et le 29 juillet 2022, le plan de sauvegarde accélérée, entièrement prépacké, est adopté.

Innovation

La principale particularité du deal réside dans l’utilisation, pour la première fois, d’un outil qui n’a jamais plus été utilisé depuis lors, à savoir la conversion du PGE en capital. « Le groupe a bénéficié d’un vrai soutien de l’Etat, qui a accepté de convertir en capital 80 % du PGE et d’indemniser les banques dès cette conversion », souligne Joanna Rousselet. Laquelle exprime un regret majeur : qu’il n’y ait pas eu plus d’offres d’investisseurs sur ce dossier. « C’est assez dommage que les acteurs du retournement français, notamment, n’aient pas plus d’appétit pour ce type de sujet », déplore-t-elle. Le groupe PVCP revendique en tout cas aujourd’hui de belles performances et une amélioration de ses résultats financiers (+ 19,4 % au 1er trimestre 2023 par rapport au 1er trimestre 2022). « Plus de deux ans plus tard, nous sommes ravis d’annoncer la hausse de + 20 % de notre chiffre d’affaires par rapport à l’an passé, et de + 35 % par rapport à 2019 », se félicite Franck Gervais. Une histoire qui finit bien.

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