En matière de contrôle des concentrations, quelles sont les grandes tendances que vous observez en France ?
En termes quantitatifs, tout d’abord, nous enregistrons depuis plusieurs années une croissance continue du nombre de décisions de contrôle des concentrations : 192 en 2015, 230 en 2016, 233 en 2017, 235 en 2018… Cette dynamique traduit la bonne tenue du marché français des fusions-acquisitions. Ensuite, sur un plan qualitatif, nous sommes confrontés à des dossiers de plus en plus complexes, qui nécessitent un dialogue approfondi avec les parties prenantes. Plusieurs facteurs expliquent cette situation. Certains secteurs d’activité étant déjà fortement concentrés (coopératives agricoles, industrie agroalimentaire…), le moindre rapprochement supplémentaire soulève mécaniquement des interrogations en termes de concurrence. En outre, l’émergence d’acteurs évoluant dans des secteurs «non traditionnels», comme le digital, et les évolutions systémiques d’un secteur conduisent à la réalisation de fusions-acquisitions d’un nouveau genre. Nous devons donc adapter nos grilles d’analyse qui prévalaient jusqu’alors – prise en compte de seuils de parts de marché du nouvel ensemble, notamment. Cette situation nous amène à faire un effort conceptuel pour mieux comprendre la situation d’un secteur, les tenants et aboutissants d’une opération et, ainsi, à discuter davantage avec les professionnels du marché.
Alors que Bruno Le Maire a dénoncé le veto de la Commission européenne sur le rapprochement
Alstom-Siemens, certains praticiens font état d’un durcissement, au cours des dernières années, des pratiques des autorités de la concurrence en Europe. Qu’en pensez-vous ?
Il convient de distinguer deux types de configurations. Face aux dossiers que l’on pourrait qualifier de simples, nous avons, depuis mon arrivée à la tête de l’Autorité, sensiblement allégé...