Depuis la privatisation de la Française des Jeux, fin 2019, les particuliers sont de plus en plus nombreux à investir en Bourse. Favorisée par l’environnement de taux bas, cette tendance est également alimentée par l’arrivée d’une nouvelle génération d’investisseurs, qualifiés d’« opportunistes ». Soucieuses de les fidéliser, plusieurs entreprises ont commencé à faire évoluer leur stratégie de communication financière.
Quelle ne fut pas la surprise des équipes financières de Total lorsqu’elles ont pris connaissance, il y a quelques semaines, des résultats de leur dernier « TPI ». Comme chaque année, le groupe cherche à connaître, après la clôture de son exercice fiscal, la composition exacte de sa base actionnariale par le biais d’une procédure de titre au porteur identifiable. Alors que le nombre de ses actionnaires individuels, en légère augmentation depuis 2016, avoisinait 450 000 avant la crise, il a depuis enregistré une croissance phénoménale. « Sur l’ensemble de 2020, nous avons attiré 100 000 investisseurs particuliers supplémentaires, informe Laurent Toutain, responsable des relations actionnaires individuels au sein de la direction financière du groupe. Une telle croissance d’une vingtaine de pourcents en l’espace de douze mois est exceptionnelle. C’est même du jamais-vu ! »
Les actifs « alternatifs » séduisent les jeunes investisseurs
- Le retour des investisseurs particuliers sur les marchés financiers ne profite pas uniquement aux actions. Comme l’a indiqué l’AMF, les ordres (achat et vente) passés sur des ETF ont augmenté depuis le début de la crise. Mais la recherche de diversification va bien au-delà. « Dans le cadre de notre dernier Observatoire de l’épargne, nous avons constaté que l’attrait pour des actifs alternatifs, en particulier les cryptomonnaies, l’or, le crowdfunding ou les forêts, allait croissant, signale Alain Tourdjman, directeur Etudes et Prospective du Groupe BPCE. Ainsi, 10 % des Français interrogés ont déjà réalisé un tel investissement, et plus de 20 % envisagent de le faire prochainement. »
- Un constat confirmé par les courtiers. « L’arrivée de nouveaux clients ces derniers mois a coïncidé avec l’emballement autour du bitcoin, observe Andrea Tuéni, responsable de la relation clients et des activités de marchés de Saxo Banque. Dans ce contexte, la demande pour des ETF offrant une exposition aux cryptomonnaies, par exemple, est en nette augmentation. »
- D’après certains spécialistes, cette situation pourrait toutefois se révéler problématique. « Au sein de la nouvelle génération d’investisseurs particuliers, certains ont souscrit des actifs sans stratégie de long terme et sans en appréhender tous les risques (forte volatilité, perte en capital…), signale Alain Tourdjman. Or, leur niveau d’expertise financière et de patrimoine moyen est souvent inférieur à celui des actionnaires traditionnels et pourraient les exposer en cas de déconvenues boursières. »
Des volumes quotidiens en nette hausse
Bien d’autres sociétés font le même constat. Alors qu’elle attire traditionnellement des particuliers, Air Liquide a indiqué mi-mai avoir accueilli 50 000 actionnaires individuels supplémentaires l’an dernier. Une situation qui n’est pas l’apanage du CAC 40. « Nous observons un retour des particuliers au sein de notre actionnariat depuis 2018, qui s’est poursuivi durant les premiers mois de la crise, confirme Grégory Sanson, directeur général délégué finance et développement de Bonduelle. Entre cette période et juin 2020, date de notre dernier TPI, leur nombre a bondi de 27 %, pour aujourd’hui avoisiner 12 000....