Une mission d’information commune sur les procédures de poursuites des infractions fiscales examine depuis début janvier, à l’Assemblée nationale, le verrou de Bercy. En quoi consiste ce mécanisme ?
Le verrou de Bercy désigne le fait que seule l’administration est habilitée à saisir le juge pénal en matière de fraude fiscale. Pour cela, l’administration doit d’abord consulter une commission, dite «commission des infractions fiscales», qui rend un avis favorable ou défavorable à l’opportunité des poursuites pénales. Cet avis est obligatoire et conforme. Ainsi, en cas d’avis non favorable, le ministre ne peut pas saisir, et, au contraire, en cas d’avis favorable, il est dans l’obligation de saisir. Dans la pratique, on constate que cette commission accorde 95 % d’avis favorables sur les dossiers dont elle est saisie et que l’administration suit généralement son avis. Ce mécanisme aboutit donc en réalité à un «double» verrou de Bercy.
En quoi ce verrou fiscal est-il problématique ?
Ce verrou est problématique pour plusieurs raisons, comme en témoigne le fait que la mission d’information soit commune aux parlementaires de la commission des lois et de celle des finances.
D’un point de vue juridique, le verrou de Bercy est un cas unique de ce que l’on appelle «la justice retenue». En effet, il s’agit d’une exception en droit français car la fraude fiscale est le seul domaine où le procureur de la République n’est pas à l’origine de la saisine du juge judiciaire. S’il fallait transposer cette situation dans le cas d’un crime, cela reviendrait à ce que le garde des Sceaux décide de l’opportunité des poursuites. C’est également une exception européenne puisque aucun autre pays européen n’a un système équivalent au verrou de Bercy !
Par ailleurs, d’un point de vue financier, on constate que la saisine de la commission des infractions fiscales par l’administration de très gros dossiers était autrefois rarissime et...