Obligation d’amélioration de la performance énergétique
La politique d’incitation aux économies d’énergie, initiée par plusieurs directives européennes, s’est notamment traduite en droit français par l’objectif de réduction des consommations d’énergie du parc des bâtiments existants.
La loi du 23 novembre 2018, dite loi ELAN, a ainsi fixé le principe de réduction de la consommation d’énergie des bâtiments tertiaires à divers horizons (2030, 2040 et 2050) par rapport à 2010. Cette obligation concerne les bâtiments à usage tertiaire privés ou publics et les ensembles de bâtiments qui accueillent une activité tertiaire sur 1 000 m2 ou plus.
La loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat a également défini des objectifs nationaux ambitieux, notamment en matière d’émissions de gaz à effet de serre (GES), visant à atteindre une neutralité carbone à l’horizon 2050.
Ces objectifs d’amélioration de la performance énergétique contraignent les propriétaires à engager des campagnes de travaux assez lourds, notamment au sein d’ensembles commerciaux.
Intervention de tiers pour améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments
Les solutions varient pour garantir une meilleure performance énergétique des bâtiments : amélioration des systèmes de chauffage ou de climatisation, réduction de la consommation d’énergie par une meilleure isolation, installation des nouveaux équipements à haut rendement énergétique ou encore installations de production d’énergies renouvelables pour réduire la dépendance énergétique des bâtiments au gaz ou à l’électricité.
Le recours à des opérateurs extérieurs pour mettre en place ces solutions est, dans tous les cas, privilégié, que ce soit pour la rénovation des installations existantes ou pour la réalisation de nouvelles installations.
Le contrat de performance énergétique, cadre contractuel privilégié
Dans le cadre d’une opération de rénovation d’un bâtiment existant, les opérateurs tiers interviennent en réalisant des travaux complexes techniquement et souvent lourds financièrement, destinés à diminuer les consommations d’énergie. Ils proposent un service comprenant le cas échéant la conception préalable, mais également le financement partiel ou total desdits travaux, ainsi que des prestations de type fournitures et exploitation et la maintenance du bâtiment pendant la durée du contrat. En contrepartie, ces opérateurs sont rémunérés par des paiements échelonnés sur une période qui peut être longue en rapport avec l’investissement réalisé et le retour attendu en termes de diminution de charges de l’immeuble.
Le contrat de performance énergétique (CPE), qui peut prendre des formes différentes, apparaît alors comme le cadre juridique privilégié.
Il vise à garantir une diminution des consommations énergétiques d’un bâtiment, vérifiée et mesurée par rapport à une situation de référence contractuelle définie en amont, sur une période donnée grâce à un investissement dans des travaux, fournitures ou prestations de services (arrêté du 24 juillet 2020).
Cette situation de référence permet de déterminer la consommation de référence pour le suivi de la performance énergétique des installations. Des pénalités financières sont prévues en cas de différence de consommation constatée par rapport à l’engagement contractuel et en l’absence d’atteinte de l’objectif d’économie d’énergie exprimé en pourcentage de la situation de référence.
L’une des contraintes de ces contrats est que les travaux et installations sont difficilement dissociables du bâti sur lequel ils interviennent et qu’ils ne permettent pas le plus souvent de transférer, notamment à titre de garantie, la propriété de ses installations.
Les enjeux juridiques
Réalisation des travaux et facturation aux preneurs des coûts liés à l’amélioration de la performance énergétique
Dans les ensembles commerciaux loués, les bailleurs et opérateurs doivent analyser en amont leur capacité à imposer les travaux aux preneurs. Il s’agit plus spécifiquement pour les bailleurs, de refacturer aux locataires les investissements nécessaires à l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments, en fonction de leur nature selon que ces travaux relèvent ou non de l’article 606 du Code civil.
Cette possibilité de refacturation (pour les interventions réalisées dans les parties communes et privatives) dépend en effet de la rédaction de chaque bail.
L’impossibilité de refacturer tout ou partie des coûts liés à l’amélioration des performances énergétiques de l’ensemble commercial peut naturellement représenter une contrainte financière importante pour un bailleur pourtant légalement contraint d’engager ces investissements.
Cadre juridique des installations sur immeuble en copropriété et travaux d’efficacité énergétique de l’ensemble commercial
L’article 24-4 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 prévoit que l’assemblée générale des copropriétaires peut soit voter un plan pluriannuel de travaux d’économie d’énergie (permettant d’étaler dans le temps les impacts financiers), soit passer un CPE (permettant de lisser l’investissement initial sur la durée d’exploitation).
Un audit énergétique du bâtiment doit ainsi être réalisé et joint à la convocation à l’assemblée pour que les copropriétaires puissent se prononcer sur le plan de travaux ou le contrat de performance énergétique.
Le syndic procède ensuite à la mise en concurrence des entreprises et fait voter les copropriétaires sur la base des devis recueillis.
Statut du personnel dédié à la gestion des équipements de l’immeuble
Lorsque la gestion des équipements de l’immeuble est confiée à un tiers, quel que soit le cadre contractuel retenu, il convient de s’assurer qu’il n’existe pas de risque de confusion quant à l’employeur des salariés concernés et le statut qui leur est applicable. Le tiers doit ainsi veiller à assumer l’ensemble des prérogatives d’employeur à l’égard de ses propres salariés et, en particulier, exercer de manière effective un pouvoir de direction permanent à leur égard. A défaut, il apparait un risque de reconnaissance de l’existence d’un contrat de travail direct entre ces salariés et le propriétaire de l’immeuble ou le syndic.
Zoom sur les enjeux fiscaux
Ils tiennent principalement dans l’analyse de la nature de travaux réalisés et du cadre dans lequel ils sont engagés – travaux et installations réalisés sur sol propre – ou sur terrain ou immeuble donné à bail à l’entreprise qui réalise les travaux et facture ensuite des prestations de services au bailleur.
Les analyses sont différentes selon les acteurs concernés, syndicats de copropriétaires ou unions de syndicats, copropriétaires personnes physiques ou morales et pour ces derniers, copropriétaires relevant ou non d’un régime d’imposition des revenus professionnels.
Les questions sont classiquement les suivantes : nature immobilisable ou non des travaux réalisés qui impactent en règle générale les parties communes et qui va conditionner, indépendamment de la refacturation éventuelle des dépenses aux locataires, la déductibilité des dépenses (i) des revenus professionnels soit en tant que dotations d’amortissement soit en tant que simples charges d’exploitation, (2) des revenus fonciers dans la limite de la définition que donne l’article 31 du CGI des charges déductibles des revenus fonciers.
Dans le cas de travaux réalisés sur « sol d’autrui » c’est-à-dire sur des terrains ou immeubles donnés à bail, c’est le double débat de la capacité juridique des copropriétaires à consentir certains baux et de l’accession en fin de bail aux travaux et aménagements réalisés sur sol d’autrui.