Le projet de directive ATAD 3 du 22 décembre 2021 tend à lutter contre l’utilisation abusive d’entités écrans à des fins fiscales. Son but est d’harmoniser les seuils de substance minimale au sein de l’Union européenne (UE) sur la base d’une série de critères objectifs. Les développements qui suivent tiennent compte des récentes propositions d’amendement formulées par le Parlement européen (1).
Règles issues d’ATAD 3 en bref
Le dispositif ATAD 3 s’applique à toute entité établie au sein de l’UE dont :
– plus de 65 % (2) des recettes encaissées au cours des deux exercices précédents sont constituées de revenus passifs (dividendes, intérêts, revenus immobiliers, etc.) ;
– plus de 55 % (3) desdites recettes sont perçues ou versées au moyen de transactions transfrontières ou, alternativement, plus de 55 % (4) de la valeur comptable de ses actifs a été constituée de biens immobiliers ou de certains actifs mobiliers localisés à l’étranger au cours des deux exercices précédents ;
– la gestion a été externalisée à un tiers au cours des deux exercices précédents (5).
Dès lors que ces critères sont cumulativement remplis, l’entité est considérée comme « à risque ». Elle est alors tenue de joindre à sa déclaration annuelle de résultat les éléments probants permettant d’établir si elle satisfait ou non aux critères de substance minimale :
– mise à disposition de locaux propres, de locaux réservés à son usage exclusif ou de locaux partagés avec des entités du même groupe ;
– détention d’un compte bancaire actif dans l’UE ;
– présence d’au moins un administrateur ou d’une majorité de salariés résidents fiscaux de l’Etat membre de l’entité (conformément à la proposition d’amendement du Parlement, les administrateurs de l’entité peuvent être salariés ou administrateurs d’une autre entité liée ou non).
Dans l’hypothèse où l’un des critères de substance minimale ne serait pas rempli, l’entité serait alors exclue du bénéfice des directives de l’UE et des dispositions favorables des conventions fiscales conclues par son Etat de résidence. Les associés de l’entité situés au sein l’UE sont dans ce cas imposés sur les revenus de l’entité comme s’ils les avaient directement perçus. En outre, ces éléments font l’objet d’un échange automatique d’information et l’absence de déclaration ou le dépôt d’une déclaration erronée sont respectivement sanctionnés d’une amende de 2 % ou 4 % des recettes de l’entité (6).
Exclusions et exonération
Certaines entités qui ne présentent pas de risque d’être utilisées comme des sociétés écrans sont expressément exclues du dispositif. Il s’agit notamment des sociétés cotées, des Fonds d’Investissement Alternatif (FIA) et des sociétés holdings établies dans le même Etat que celui de leurs actionnaires ou de leur entité mère ultime. Il est à déplorer que les sociétés holdings intégrées aux plateformes d’investissement constituées par des FIA ne bénéficient d’aucune exonération spécifique.
Au demeurant, toute entité peut expressément demander à être temporairement exonérée du dispositif dès lors que son interposition ne permet aucune économie d’impôt au niveau de ses bénéficiaires effectifs ou du groupe dont elle est membre.
Renversement de présomption
En complément des mesures d’exclusion et d’exonération, un mécanisme de renversement de la présomption d’absence de substance minimale permet d’échapper aux lourdes conséquences attachées à l’application du dispositif. Afin d’en bénéficier, l’entité est notamment tenue de produire les éléments probants permettant de justifier les motifs commerciaux ayant présidé à son établissement.
1. Résolution législative du Parlement européen (P9_TA(2023)0004) du 17 janvier 2023
2. 75 % dans le projet initial de Directive.
3. 60 % dans le projet initial de Directive.
4. 60 % dans le projet initial de Directive.
5. De manière très critiquable, le projet initial de Directive ne prévoyait pas d’exclusion en cas de sous-traitance intragroupe ; la proposition d’amendement du Parlement a ainsi été plus que bienvenue sur ce point.
6. 5 % dans le projet initial de Directive.