La lettre des fusions-acquisition et du private equity

Décembre 2016

Bénéficiaires effectifs : regards croisés de part et d’autre du channel

Publié le 9 décembre 2016 à 12h08    Mis à jour le 9 janvier 2017 à 15h45

Bill Carr et Alexandra Rohmert

Par Bill Carr, avocat associé en Corporate/Fusions & acquisitions de CMS Cameron McKenna LLP. Il soutient les entreprises pour la réalisation de transactions notamment dans les domaines des joint-ventures, des restructurations et des fusions-acquisitions domestiques et cross-border. bill.carr@cms-cmck.com et Alexandra Rohmert, avocat associé en Corporate/Fusions & acquisitions. Elle accompagne les entreprises, essentiellement étrangères, dans leurs projets internationaux et plus particulièrement dans le cadre de fusions-acquisitions cross-border. alexandra.rohmert@cms-bfl.com 

Les obligations introduites en droit anglais peuvent concerner des personnes françaises contrôlant des sociétés anglaises et éclairent l’approche française sous l’angle comparatiste

Dans un contexte de lutte renforcée contre le terrorisme et le blanchiment de capitaux, l’introduction d’une obligation, notamment pour les sociétés, d’obtenir et de conserver des informations exactes et actualisées sur leurs bénéficiaires effectifs requiert une attention particulière. Dans sa version quasi définitive, la loi Sapin II prévoit la création d’un registre public des bénéficiaires effectifs de certaines sociétés, complémentaire de l’actuel registre national des trusts, à l’instar du droit anglais qui connaît depuis juin 2016 une obligation d’identification et de déclaration des persons with significant control (PSCs).

Les entités visées devront ainsi fournir au RCS un certain nombre d’informations relatives à leurs bénéficiaires effectifs, lors de leur immatriculation, puis régulièrement ensuite afin de les mettre à jour. A titre de comparaison, les informations communiquées à la Companies House au Royaume-Uni doivent être mises à jour sur une base annuelle. La liste des informations devant être communiquées, incluant au Royaume-Uni les nom, nationalité, date de naissance et adresse de la PSC, n’a pas encore été précisée en France et devra être fixée par décret. De même, l’accès à ces informations, en principe rendues publiques sauf circonstances particulières dans le dispositif anglais, devra être précisé, une distinction devant être opérée entre celles qui seront mises à la disposition du public et celles qui ne seront accessibles qu’aux autorités publiques compétentes.

Par ailleurs, si la notion clé de «bénéficiaire effectif» n’est pas inconnue du droit français, le nouveau dispositif renvoyant expressément à la définition qu’en donne le Code monétaire et financier (CMF), elle peut soulever des interrogations. Pour mémoire, le bénéficiaire effectif s’entend de manière alternative, comme une «personne physique qui contrôle directement ou indirectement le client ou une personne physique pour laquelle une transaction est exécutée ou une activité est réalisée». Or, la caractérisation du contrôle dans la première branche peut susciter des difficultés. Des critères objectifs sont certes proposés à cette fin, à savoir la détention directe ou indirecte de plus de 25 % du capital ou des droits de vote de la société considérée, à l’instar de ce que préconise le système anglais. Pour autant, l’appréciation subjective également ouverte par le CMF et fondée sur l’exercice, par tout autre moyen, d’un «pouvoir de contrôle sur les organes de gestion, d’administration ou de direction ou sur l’assemblée générale de la société» peut paraître délicate à appréhender, à défaut de précisions complémentaires.

Le dispositif anglais s’avère bien plus coercitif : incessibilité des actions, perte des droits y attachés et sanctions pénales

Précision d’importance, enfin : le texte français ne prévoit aucune sanction spécifique en l’absence de communication. D’où la tentation d’en déduire que ce dispositif se réduit à une seule obligation de moyen. A cet égard, la transposition en droit anglais s’avère bien plus coercitive, prévoyant un arsenal de sanctions tant civiles que pénales à l’encontre de l’entité et de ses représentants qui ne se conformeraient pas à leurs obligations. Outre l’incessibilité des actions et la perte des droits qui leur sont attachés, l’individu qui refuserait de communiquer les informations dont il dispose sur des bénéficiaires effectifs encourt des sanctions pénales.


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Florilège de mesures de la loi Sapin II pour les sociétés de gestion (la suite)

Jérôme Sutour

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