Dans la lignée de l’ANI adopté par les partenaires sociaux, le législateur crée, renforce ou aménage de nombreuses obligations sociales à la charge des entreprises, impactant à notre sens fortement celles qui n’auront pas toujours le relais RH suffisant pour répondre à ces nouveautés. Nous vous proposons de voir deux de ces nouveautés.
Par Florence Bequet-Abdou, avocat, Cabinet Landwell & Associés
1. Les administrateurs salariés
La première est la création des administrateurs salariés, siégeant au conseil d’administration. Leur nombre est d’un administrateur salariés dans les conseils de moins de 12 administrateurs et de deux administrateurs dans les autres. Les entreprises devront respecter le principe de parité homme/femme dans la répartition des sièges salariés, titulaires et suppléants. Ces salariés ne pourront être licenciés qu’après autorisation de l’inspection du travail.
Point intéressant, dans les entreprises où un minimum de deux représentants sera désigné ou élu, ces derniers pourront ne pas être employés par la société française, afin de favoriser une représentation des membres du Comité d’entreprise européen. L’intérêt d’une telle mesure sera à étudier, dans le futur, beaucoup de conseils d’administration se déroulant en langue française.
Il est à noter enfin que les grands groupes internationaux siégeant en France ne seront que peu impactés par cette mesure. En effet, beaucoup de directions ont décidé d’anticiper cette obligation dans le cadre de leur gouvernance interne, afin notamment de favoriser un dialogue social constructif.
2. La base de données unique
La seconde nouveauté sera à notre sens, pour les entreprises, soit une opportunité, soit une réelle contrainte, compte tenu de la gestion administrative qu’elle laisse présager. Il s’agit de la création d’une base de données unique regroupant différentes informations économiques, financières et sociales de l’entreprise que l’employeur mettra de manière permanente à la disposition des membres du comité d’entreprise, des délégués du personnel, du CHSCT et des délégués syndicaux.
Cette disposition vise toutes les entreprises de plus de 50 salariés, mais prévoit un calendrier de mise en conformité d’un an à compter de la date de la promulgation de la loi pour les entreprises de plus de 300 salariés, soit avant le 17 juin 2014, et de deux ans pour les entreprises de moins de 300 salariés, soit avant le 17 juin 2015.
Les objectifs affichés de cette base de données sont par clairs :
(i) être un support pour une réflexion des parties sur la stratégie de l’entreprise,
(ii) permettre aux instances représentatives du personnel (IRP) de disposer en continu d’une information régulièrement mise à jour,
(iii) regrouper et remplacer à terme l’information récurrente déjà diffusée dans les entreprises. L’entrée en vigueur de cette obligation sera fixée par décret, au plus tard au 31 décembre 2016.
Si la loi est précise sur les différentes rubriques (plus de dix à ce jour) et renvoie à un décret pour la définition de différents items, elle ne fixe jamais les modalités pratiques de la réalisation d’une telle base, et encore moins les moyens à mettre en œuvre pour son actualisation.
Attention, dans ce cadre, à une nouveauté de taille au regard des informations habituellement transmises aux IRP : une présentation des orientations stratégiques de l’entreprise avec un contenu rétrospectif, prospectif et actualisé sur les deux années précédentes et l’année en cours, mais surtout sur les perspectives sur les trois années suivantes devra être intégrée à cette base. Quand on mesure la difficulté d’un gouvernement à établir des orientations sur plus d’une année, il paraît très difficile d’imaginer une communication efficace sur des perspectives à trois ans. Notre expérience professionnelle nous conduit à penser que le contentieux du délit d’entrave devrait avoir de beaux jours dans les prochaines années.