Etre compétitif et satisfaire à leurs objectifs économiques ne sont plus les seules difficultés auxquelles sont exposés les dirigeants. Désormais, tant dans la gestion quotidienne des ressources humaines que dans des situations particulières de la vie de l’entreprise, la direction générale a l’obligation de gérer dans les meilleures conditions possibles les facteurs de risques humains.
Par Florence Bequet-Abdou, avocat, Cabinet Landwell & Associés
Désormais, chaque entreprise, lors d’une réorganisation structurelle ou conjoncturelle, est confrontée de façon plus ou moins aiguë à anticiper, encadrer et prévenir les facteurs de risques humains inhérents aux opérations nécessaires à son développement. Et à ce sujet, il faut noter que les entreprises sont confrontées à une mosaïque de dispositions légales et réglementaires. Une tentative de définition générale des facteurs des risques humains serait qu’il s’agit d’une catégorie de risques professionnels relatifs aux conditions de travail dont les effets portent atteinte à la santé physique et mentale des travailleurs, regroupant notamment le stress, le harcèlement (loi du 6 août 2012 sur le harcèlement sexuel), la violence et les discriminations, ces risques pouvant entraîner de la souffrance, de l’épuisement professionnel jusqu’à la dépression.
Il nous paraît utile de préciser que, si le terme «stress» est souvent générique, les chiffres estimés par l’Institut national de recherche et de sécurité confirment une situation préoccupante : le coût social du stress au travail en France en 2010 serait compris entre 830 et 1 656 millions d’euros, ce qui représente 10 à 20 % des dépenses de la branche accidents du travail/maladies professionnelles de la Sécurité sociale. Ce stress au travail serait à l’origine de pathologies telles que les troubles musculo-squelettiques (TMS) et lombalgies, maladies cardio-vasculaires (MCV), et les dépressions pouvant conduire à des actes de suicide.
Ce risque toucherait quatre salariés sur dix, concernerait de plus en plus les cadres et les cadres supérieurs (57 %) et serait un risque fortement identifié dans les grandes entreprises. Les principales causes identifiées à l’existence de facteurs de risques humains sont :
– l’organisation du travail et les changements dans le travail ;
– l’insatisfaction des salariés au regard de leurs exigences individuelles ;
– les mauvaises relations avec la hiérarchie, constat généralement d’une absence de communication du management intermédiaire envers les équipes ;
– les relations réduites ou limitées avec les collègues ne permettant pas d’exprimer son mal-être ;
– la faible présence de représentants syndicaux dans l’entreprise.
Le plan Darcos a abouti à des mesures concrètes dans différentes entreprises, dans le cadre des accords collectifs de «gestion du stress». Actuellement, le déploiement en cours du Plan santé 2010-2014 affiche clairement ses ambitions de lutte et de prévention des risques psychosociaux, reliant ainsi la position de certains tribunaux qualifiant d’accident du travail des cas de souffrances au travail caractérisés pouvant conduire au suicide du salarié.
A ces dispositifs s’ajoutent de multiples textes sociaux, comme la loi sur la pénibilité, applicable depuis 2012, imposant aux entreprises la signature d’un accord collectif ou la mise en œuvre d’un plan de prévention obligatoire.
Enfin, le rôle du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) devient incontournable pour l’employeur dans toutes ses réorganisations.
Ainsi, la gestion efficace des facteurs de risques humains s’impose à toutes les entreprises privées ou publiques, qui sont directement responsables envers leurs salariés mais également leurs clients de leur capacité à éviter des conséquences humaines regrettables, faute de voir leur réputation auprès des jeunes talents et leur image commerciale fortement affectées.