La lettre gestion des groupes internationaux

Décembre 2020

Pilier 2 ­– L’assiette de l’impôt GloBE : une base commune fondée sur les comptes consolidés retraités

Publié le 2 décembre 2020 à 10h33    Mis à jour le 3 décembre 2020 à 11h31

Dans le cadre des règles de GloBE, un impôt complémentaire sera dû si le taux effectif d’imposition (TEI) d’une juridiction ou pays est inférieur au taux minimum GloBE mondial, permettant ainsi de porter la charge fiscale globale sur les bénéfices de cette juridiction à hauteur de ce taux minimum.La clé de voûte du dispositif GloBE est ainsi le TEI d’une juridiction. Il faut, pour déterminer ce TEI, attribuer la base d’imposition («revenus GloBE») et la charge fiscale à retenir («impôts couverts») entre les juridictions dans lesquelles le groupe exerce ses activités et paie des impôts, puis calculer le ratio entre le revenu GloBE (au dénominateur) et les impôts couverts (au numérateur) afin d’obtenir le TEI.


Par Delphine Bocquet, avocat associée, PwC Société d’Avocats et Sven Dufils, Directeur - Tax Reporting & Strategy


 

 

Comment est déterminé le revenu GloBE d’une juridiction ?


Le point de départ du revenu GloBE est basé sur le référentiel de consolidation du groupe

Afin de tenter de minimiser les coûts et la complexité du dispositif, le point de départ pour l’application des règles GloBE est le résultat avant impôts de chacune des entités du groupe déterminé d’après les normes de comptabilité financière de la société mère pour ses comptes consolidés. Dans le cas des groupes français cotés sur un marché réglementé, il s’agira donc du référentiel IFRS.

Les sociétés mères sont autorisées à se fonder sur les informations financières disponibles au niveau des entités du groupe et utilisées pour préparer les états financiers consolidés de la société mère, en d’autres termes le «reporting package», sous certaines conditions. Ces conditions imposent notamment que l’information soit fiable et qu’il n’y ait pas de divergences permanentes majeures entre les règles et méthodes comptables utilisées pour la préparation du reporting package et les règles et méthodes comptables du groupe. En effet, les reporting packages sont préparés sur la base du manuel comptable groupe qui pourrait présenter, dans certains cas, des différences par rapport à une application stricto sensu des normes applicables à la société mère. En pratique, les groupes devraient utiliser ces reporting packages comme point de départ du calcul.


Des retraitements en nombre limité sont à opérer pour tenir compte des principales différences permanentes

Des retraitements doivent ensuite être opérés au niveau du résultat avant impôts des entités du groupe afin d’ajouter ou de supprimer certains éléments de manière à obtenir le revenu pris en compte pour GloBE. Ces retraitements ont vocation à refléter les principales différences permanentes matérielles et communes aux différents systèmes fiscaux. Il s’agira notamment de :

– la déduction des dividendes afférents à des titres de participations (le seuil de détention nécessaire restant à définir) ;

– la neutralisation des bénéfices et pertes des entités consolidées par mise en équivalence ;

– la neutralisation des plus ou moins-values sur titres de participation et titres comptabilisés à la juste valeur ;

– la réintégration des impôts couverts (i.e. les impôts retenus au numérateur du TEI) qui ne seraient pas considérés comme un impôt sur le résultat selon le référentiel comptable utilisé pour les états financiers consolidés ;

– la réintégration des rémunérations en actions (actions gratuites, stock-options) dans la mesure où elles ne seraient pas déductibles d’après les normes fiscales locales ;

– la réintégration des amendes et pénalités (à partir d’un seuil proposé de 50 000 euros) ;

– la neutralisation des gains et pertes sur restructurations calquée sur les règles fiscales locales ;

– des règles spécifiques pourraient être prévues pour appréhender les déductions immédiates de certaines dépenses et les amortissements accélérés admis par certains systèmes fiscaux.

Ainsi, les retraitements du revenu pour GloBE n’intègrent pas la grande majorité des différences temporaires pour le calcul du TEI «brut». Le dispositif GloBE prévoit toutefois, dans un second temps, après un premier calcul du TEI, un mécanisme simplifié destiné à remédier aux problèmes de différences temporelles pouvant impacter le TEI de manière significative. Ce mécanisme s’applique juridiction par juridiction et comporte des modalités de calcul des pertes antérieures à l’entrée en vigueur du régime et des excédents d’impôts, afin de déterminer un TEI «ajusté».


Des retraitements sont à prévoir également au titre des ajustements de consolidation

Ces premiers retraitements effectués, il est ensuite prévu de prendre en considération certains ajustements de consolidation.

Comme le TEI GloBE devrait être calculé par juridiction, les transactions intragroupes ne seraient pas neutralisées. Ces opérations intragroupes devront être prises en compte conformément au principe de pleine concurrence ; ainsi d’éventuels retraitements doivent être intégrés pour tenir compte d’ajustements des prix de transfert. Par exception, les juridictions pourraient exiger ou autoriser les contribuables à éliminer les transactions intragroupes entre entités résidentes fiscales de la même juridiction.

Par ailleurs les allocations de prix d’acquisition (PPA) ne doivent pas être prises en compte, c’est-à-dire que, pour le revenu GloBE, ce sont les valeurs historiques qui seront retenues. Les groupes seront donc amenés, dans un certain nombre de cas, à procéder à des retraitements, les PPA étant souvent inclus dans le reporting package de l’entité.

Un autre ajustement usuel de consolidation concerne les rémunérations en actions au profit d’employés de filiales étrangères : celles-ci peuvent être prises en compte dans le revenu GloBE (c’est-à-dire déduites) si leur déduction est admise en normes fiscales locales.

Enfin, d’autres éléments reconnus au niveau consolidé ne doivent être pris en compte dans le revenu GloBE d’une entité que dans les situations où ils peuvent être rattachés de manière fiable et cohérente à cette entité.

 

Le revenu GloBE ayant été déterminé par entité en application des règles décrites ci-dessous, la dernière étape consiste à l’agréger par juridiction en vue du calcul du TEI de la juridiction en question.

Il ressort de ce qui précède que la détermination du revenu GloBE comporte des différences notables d’une part avec les informations utilisées par les groupes pour la détermination de leur résultat comptable consolidé et d’autre part avec le résultat fiscal. Il s’agirait presque d’un «troisième jeu de comptes», sous réserve des simplifications que l’OCDE pourra être amenée à adopter pour décomplexifier le dispositif GloBE. 


La lettre gestion des groupes internationaux

Pilier 1 – Vers une simplification des règles de calcul du montant A ?

La notion de «montant A», fraction du surprofit des multinationales ayant vocation à être imposée au niveau des juridictions de marché, a vu le jour à l’occasion de la publication, le 9 octobre 2019, d’un document de consultation publique proposant une «approche unifiée» dans le cadre du Pilier 1. Depuis cette date, soit pendant plus d’un an, les multinationales engagées dans la commercialisation de services digitaux automatisés et/ou de biens et services de consommation n’ont cessé de mettre en avant la complexité technique entourant le calcul de ce montant A. Consciente de ces difficultés, l’OCDE présente, dans le Blueprint du 12 octobre 2020 sur le Pilier 1, un certain nombre de règles pratiques qui pourraient être retenues pour calculer le montant A.

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