Motivé par des considérations d’ordre politique et économique, le Royaume-Uni, prenant le parti de l’attractivité fiscale domestique et internationale, a entamé un processus de renouveau de sa législation fiscale. Cette volonté d’attrait des investisseurs n’est pas sans rappeler les doux mots de Messieurs Cameron et Johnson adressés à l’égard de la France, le premier se disant prêt à «dérouler le tapis rouge» pour les entreprises fuyant l’impôt en France, et le deuxième fustigeant la politique fiscale de notre pays, «prêt à accueillir tous les Français talentueux à Londres» !
Par Hélène Rives, avocat associée, Landwell & Associés
Le Royaume-Uni veut se positionner de manière dynamique sur le plan fiscal comme une terre d’accueil prometteuse et cherche à tirer son épingle du jeu dans la mouvance des recommandations du rapport BEPS de l’OCDE en offrant des dispositifs particulièrement attractifs pour les entreprises déployant leurs activités depuis son territoire. Son ambition : devenir un réel «hub pour multinationales» en créant des conditions d’accueil idéales pour les sociétés, ce qui passe, selon les termes mêmes de l’administration fiscale, par la mise en place d’un «système fiscal compétitif et stable qui encourage le commerce et la confiance dans l’investissement».
Aujourd’hui, lorsque l’on compare les mérites des différentes terres d’accueil pour sociétés holdings, le Royaume-Uni tire particulièrement son épingle du jeu. Depuis 2010, le gouvernement a façonné une politique fiscale plus claire, plus transparente et plus efficiente dans une économie moderne et mondialisée, avec pour but affirmé de créer le système fiscal le plus attractif des pays du G20.
Tout d’abord, le taux d’impôt sur les sociétés est aujourd’hui de 21 % et descendra à 20 % en avril 2015. Ce taux sera alors le plus faible du G7 et du G20, à égalité avec la Russie, l’Arabie Saoudite et la Turquie.
En outre, le Royaume-Uni a mis en œuvre une réforme globale du régime des sociétés étrangères contrôlées («SEC ou CFC rules») afin de rendre ce dernier très attractif. Il favorise désormais une approche plus territoriale de l’impôt et a adopté une position pragmatique à l’égard des structures financières détenues par les sociétés britanniques dans des pays à fiscalité privilégiée. Le Royaume-Uni exonère ainsi les profits rapatriés, à travers ces sociétés, de l’impôt anglais, sauf cas de situations manifestement abusives. Le régime applicable aux sociétés financières désormais en vigueur permet de ne taxer en Grande-Bretagne que 25 % des profits réalisés par la société financière localisée dans un pays à fiscalité privilégié, soit un taux de taxation effectif en Grande-Bretagne de 5 % du revenu.
Le Royaume-Uni dispose de nombreuses autres armes, notamment, et ceci depuis le 1er juillet 2009, l’exonération totale des dividendes reçus par les sociétés mères. Il faut également souligner le réseau de conventions fiscales particulièrement avantageuses dont bénéficie le Royaume-Uni, ainsi qu’une exonération totale des plus-values de cession de droits sociaux par les sociétés détenant plus de 10 % du capital.
A également été mis en place le régime fiscal particulièrement avantageux de la «patent box» afin d’encourager le développement et l’exploitation de la propriété intellectuelle au Royaume-Uni. Les profits relatifs aux brevets (redevances, plus-values de cession de brevets et produits qui contiennent une innovation brevetée ou brevetable) sont dorénavant taxés à seulement 10 %.
Enfin, des régimes favorables sont accessibles en lien avec les activités de recherche. A ce titre, les grandes entreprises peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt de 10 % des dépenses de recherche «RDEC» (R&D Expenditure Credit), crédit lui-même taxable, soit un gain net de 8 % après impôt à 20 %. Alternativement, pour les dépenses de recherche supportées avant le 1er avril 2016, les grandes entreprises peuvent opter pour une déduction de 130 % de la charge des dépenses éligibles. Des mesures encore plus favorables sont accessibles pour les PME, notamment la possibilité de déduire, sous certaines conditions, 225 % des dépenses de R&D éligibles, ou, pour les sociétés déficitaires, la possibilité d’obtenir un remboursement de 11 % de leurs dépenses de R&D éligibles (14,5 % pour celles engagées à compter du 1er avril 2014).
Ces règles ne sont évidemment pas sans émouvoir certaines organisations supra-gouvernementales. Ainsi, le régime de la «patent box» est en cours d’examen par le groupe Code de conduite à la demande de la Commission européenne. Résultats à suivre…