La lettre gestion des groupes internationaux

Mars 2014

Quel avenir pour la fiscalité internationale ?

Publié le 28 mars 2014 à 18h59

Renaud Jouffroy

Après l’Union européenne et sous l’impulsion du G20, l’OCDE a préparé un plan d’action complet de mesures destinées à lutter contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, «BEPS» en anglais, pour Base Erosion and Profit Shifting. Ce plan de 15 grandes actions publié fin 2013 pourrait déboucher sur une des plus grandes transformations de la fiscalité internationale depuis cinquante ans. Les premières conclusions de ces travaux, qui ne touchent pas que les impôts directs, sont prévues pour septembre 2014 et 2015.

par Renaud Jouffroy, avocat associé, Landwell & Associés

Pouvoirs politiques, organisations internationales, ONG, médias, parlementaires se sont emparés du sujet de l’optimisation fiscale internationale, souvent accusée d’être dommageable ou agressive.

Les règles fiscales traditionnelles sont perçues comme présentant des failles ouvrant trop largement la voie au «tax planning» à l’échelle de la planète. Avec la globalisation (60 % des flux mondiaux sont transnationaux) et le développement de l’économie numérique, cet état de fait pèserait lourdement sur les recettes des Etats.

Après l’Union européenne et sous l’impulsion du G20, l’OCDE a préparé un plan d’action complet de mesures destinées à lutter contre l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices, «BEPS» en anglais, pour Base Erosion and Profit Shifting.

Ce plan de 15 grandes actions publié fin 2013 pourrait déboucher sur une des plus grandes transformations de la fiscalité internationale depuis cinquante ans. Les premières conclusions de ces travaux, qui ne touchent pas que les impôts directs, sont prévues pour septembre 2014 et 2015.

L’OCDE avance à marche forcée et les premiers projets de rapports sont déja soumis à consultation du public (dont ceux relatifs aux montages hybrides, l’utilisation abusive des conventions fiscales et l’économie numérique).

Il est intéressant d’observer la réaction des Etats dans cette transformation. Le Royaume-Uni veut se positionner comme une terre d’accueil prometteuse, réel «hub pour les multinationales». Certains pays cherchent à colmater les brèches en affirmant leur attachement à la substance, comme les Pays-Bas, tandis que d’autres annoncent de véritables réformes qui, tout étant conformes aux évolutions internationales, permettraient à leur régime de demeurer aussi attractif qu’auparavant.

Dans cette concurrence entre Etats, les institutions européennes veillent au grain en s’appuyant notamment sur la notion d’aide d’Etat. Il s’agit là d’une arme redoutable contre la concurrence fiscale dommageable, activement utilisée, aux contours difficiles à appréhender, ce qui en fait une source d’incertitude et de risques pour les entreprises, que la Commission tente de réduire en clarifiant la définition et le champ d’application.

Sur la plupart des fronts, la France anticipe le résultat des conclusions des travaux internationaux avec plus ou moins d’à propos. Bien que le plan d’action BEPS contienne quelques contreparties positives pour les entreprises, telles que la recherche d’une meilleure efficacité des règlements des différends internationaux, le législateur a trouvé opportun de supprimer la suspension de la mise en recouvrement de l’impôt redressé en cas de procédure amiable. De même, le nouveau régime des hybrides déguise avec peine une discrimination que la jurisprudence de la Cour de justice pourrait condamner. Sur le plan interne, le Conseil constitutionnel, en se limitant à jouer son rôle de défenseur des libertés et de la qualité et cohérence des travaux législatifs à l’occasion des lois de finances, rappelle que lutter contre l’optimisation fiscale ne peut aboutir à systématiser le soupçon de fraude.


La lettre gestion des groupes internationaux

L’optimisation fiscale et le Conseil constitutionnel

Philippe Durand

Le Conseil constitutionnel devrait-il être ou serait-il un défenseur de l’optimisation fiscale comme l’ont suggéré certains : les uns par conviction que contraindre les contribuables à choisir la voie fiscalement la plus coûteuse est l’antichambre du totalitarisme ; les autres parce qu’ils voient dans certaines décisions d’annulation l’indice d’une légitimation de la fraude ? L’examen des décisions récentes ne confirme pas cette analyse.

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