Après avoir lutté contre la déflation, le Japon se retrouve confronté à une rapide hausse des prix et à la nécessité d’augmenter ses taux. C’est une nouvelle donne pour les entreprises de l’Archipel. Pour Julien Faure, gérant chez Amiral Gestion, la cote japonaise offre d’intéressantes opportunités d’investissement dans des actions de qualité mais sous-valorisées.
Comment le Japon se positionne-t-il dans le contexte mondial d’inflation et de hausse des taux ?

Depuis dix ans, le Japon évoluait dans un environnement sans inflation. Ce n’est plus le cas : l’inflation a atteint 4 % en décembre, avec notamment des prix alimentaires qui connaissent une hausse significative. Les salaires, eux aussi, enregistrent une progression d’une ampleur inédite depuis 20 ans : dans des secteurs sous tension en termes de recrutement, des entreprises comme Nintendo ou Sega ont consenti des hausses de plus de 15 %, Uniqlo proposant même des augmentations de 30 % pour certains jeunes collaborateurs. Dans ces conditions, il n’y a plus de raisons de maintenir les taux d’intérêt aussi bas que par le passé. On peut donc s’attendre à des hausses de taux. En outre, le yen est aujourd’hui fortement sous-valorisé : il n’a jamais été aussi peu cher depuis deux décennies. Mais il pourrait s’apprécier, si l’épargne largement investie à l’étranger revenait, attirée par la hausse des taux. Cette hausse du yen serait théoriquement pénalisante pour les entreprises fortement exportatrices dont la base de coûts est centrée sur le Japon, et au contraire bénéfique pour des entreprises domestiques, par exemple dans les services informatiques. Quant à la hausse des taux, elle serait favorable aux valeurs financières.
Comment comptez-vous profiter de ce nouvel environnement de marché ?
Chez Amiral Gestion, nous ne cherchons pas à prendre des paris sur les évolutions macroéconomiques et monétaires. Nous visons essentiellement à éviter leurs conséquences négatives : nous évitons les entreprises trop endettées – cela concerne très peu les sociétés japonaises qui sont bien capitalisées – et les entreprises dont les valorisations ont bénéficié de la baisse des taux. En ce qui concerne la cote japonaise, nous cherchons au contraire à surpondérer deux types d’entreprises. Nous ciblons tout d’abord des sociétés très actives en matière de croissance externe mais dont la valorisation reste raisonnable. C’est par exemple le cas du groupe Open Up, spécialisé dans le recrutement d’ingénieurs, qui utilise son importante trésorerie pour mener des acquisitions mais dont l’action reste à un prix raisonnable.
Nous nous focalisons également sur les entreprises dont la valorisation offre une forte décote sur actif net mais qui pourraient prochainement bénéficier d’un élément catalyseur. Une entreprise de services numériques comme Business Brain est dans ce cas. Elle a récemment coté sa filiale spécialisée en cybersécurité et conservé une participation. Or aujourd’hui, sa propre valorisation ne dépasse pas celle de cette participation, le marché étant convaincu qu’elle ne fera rien de l’argent levé. Nous nous sommes donc engagés dans un dialogue avec son management pour le faire évoluer. Avec succès puisque l’entreprise a entrepris un programme de rachat d’actions portant sur 10 % du flottant et a annoncé une augmentation du dividende. Son cours a rebondi. C’est ce même type de performance décorrélée de l’évolution macroéconomique que nous ciblons avec une entreprise comme Nissan Shatai. Il s’agit d’une filiale de Nissan dédiée à l’assemblage qui aujourd’hui consacre la majorité de sa trésorerie à des prêts avantageux à sa maison-mère et qui est donc faiblement valorisée. La Bourse de Tokyo commence à s’attaquer à ces pratiques en exigeant un renforcement des règles de gouvernance des entreprises de sa cote. Comme en parallèle, le groupe Nissan est en profonde réorganisation et peut avoir besoin de cette trésorerie, nous nous attendons à ce que Nissan Shatai soit retirée de la cote.
Qu’apportent les actions japonaises dans un portefeuille ?
Sur la cote japonaise, on continue de trouver des valeurs de qualité, rentables mais bon marché, et une grande profondeur de cote (plus de 3 600 entreprises). En outre, dans un contexte de ralentissement de la mondialisation, les entreprises qui chercheraient à se passer de la Chine pourraient trouver, avec le Japon, une alternative intéressante car ce pays a gardé une expertise industrielle forte accessible à un prix compétitif. Chez Amiral, nous avons une forte conviction en faveur des actions japonaises, puisqu’elles pèsent 50 % de notre fonds Sextant Asie, contre 35 % pour l’indice correspondant. n
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