A l’occasion de la publication d’une réponse ministérielle Grau le 10 juillet 2018, l’Administration apporte à nouveau deux très importantes précisions sur l’application de l’article 257 bis du Code général des impôts (CGI) aux transmissions d’immeubles (RM Grau, question n° 7359, JO AN 10/07/2018, p. 6063). Elle complète le tableau des modalités d’application de la dispense en présence de contrats de crédit-baux immobiliers et précise son articulation avec les régimes de faveur en matière de droits de mutation des articles 1594-0G A et 1115 du CGI.
Par Amélie Retureau, avocat counsel en fiscalité. Elle conseille et assiste les entreprises en matière de TVA et autres taxes indirectes, et de taxe sur les salaires. amelie.retureau@cms-fl.com
Dans deux décisions du 23 novembre 2015 (SCI JM3 FOR et JM5 SAR, n° 375054 et 3750551), le Conseil d’Etat avait jugé que la revente d’un actif, par un crédit-preneur, peu de temps après qu’il ait lui-même levé l’option d’achat, bénéficiait de la dispense prévue par l’article 257 bis du CGI, à la condition que l’immeuble ait été donné en location préalablement par le crédit-preneur et que le nouvel acquéreur poursuive cette activité.
Cette solution avait été reprise dans une mise à jour du Bulletin officiel des finances publiques du 3 janvier 2018 (BOFIP TVA-DED-60-20-10 n° 286), mais l’Administration n’y apportait pas de précision sur le régime applicable à la levée d’option précédant la revente bénéficiant de la dispense.
Le régime de cette vente est désormais traité par la réponse ministérielle. L’Administration précise que - toujours dans l’hypothèse d’un immeuble pris en crédit-bail et donné en sous-location, au moins partiellement soumise à la TVA, par le crédit-preneur - la levée d’option bénéficie de la dispense, quand bien même le crédit-preneur revendrait l’actif immédiatement ou à très brève échéance.
Par ailleurs, l’Administration profite de cette réponse ministérielle pour indiquer que la dispense de l’article 257 bis du CGI demeure applicable si, dans la situation décrite ci-dessus, le crédit-preneur ou le sous-acquéreur souscrit un engagement de construire (article 1594-0 GA du CGI) ou de revendre (article 1115 du CGI) en matière de droits de mutation.
Les termes très généraux de la rédaction confirment selon nous que la même analyse s’applique en dehors de situations impliquant un contrat de crédit-bail immobilier («ces engagements en matière de droits de mutation étant, en tout état de cause, dépourvus de portée en ce qui concerne l’appréciation des conditions d’éligibilité à la dispense prévue à l’article 257 bis du CGI»).
La solution n’est pas nouvelle en ce qui concerne l’engagement de construire puisque la possibilité de combiner les articles 1594-0G A et 257 bis du CGI a été identifiée très rapidement après 2006, mais elle était discutée par les praticiens en ce qui concerne l’article 1115 du CGI.
L’application du régime prévu par cet article lors d’une acquisition en dispense de TVA n’avait fait l’objet que de validations par voie de rescrits individuels isolés depuis la réforme de 2010 qui a banalisé l’engagement de revendre et donc ouvert la porte à la combinaison des deux mécanismes. Rappelons, en effet, que c’est depuis cette réforme que l’acquisition sous le bénéfice de l’article 1115 du CGI n’est plus réservée aux cas d’affectation des biens à la revente et donc, n’exige plus une comptabilisation en stock, qui interdirait l’application de la dispense de TVA.
La réponse ministérielle Grau réaffirme à cet égard que l’inscription en stock révèle l’intention de l’acquéreur de ne pas affecter durablement l’immeuble à une activité de location, mais de le destiner à la revente, ce qui interdit toujours l’application de la dispense. Cette inscription comptable relève, selon l’Administration, d’une décision de gestion de l’assujetti.
1. Voir notre Lettre de l’Immobilier, parue le 7 mars 2016, en partenariat avec le magazine Option Finance