La lettre de l'immobilier

Février 2017

Réforme du droit des contrats : consécration d’une obligation générale d’information précontractuelle

Publié le 3 février 2017 à 14h43    Mis à jour le 3 février 2017 à 16h56

Céline Cloché-Dubois

Avant l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, différents textes spécifiques organisaient des obligations particulières d’information en matière environnementale, notamment en cas de mutation des biens.

Par Céline Cloché-Dubois, avocat counsel en droit de l’urbanisme et de l’environnement. Elle intervient tant en conseil qu’en contentieux auprès des entreprises et des personnes publiques. celine.cloche-dubois@cms-bfl.com

Toutefois, aucun texte ne prévoyait expressément une obligation générale d’information à la charge des parties. Désormais, le nouvel article 1112-1 du Code civil, qui est entré en vigueur le 1er octobre 2016, consacre un tel devoir général précontractuel d’information d’ordre public, même si des obligations particulières d’information demeurent.

Rappel des règles applicables avant l’ordonnance du 10 février 2016

La loi dite ALUR du 24 mars 2014 a introduit l’obligation pour le vendeur ou le bailleur, dans le cadre de la vente ou de la location d’un terrain situé en «secteur d’information sur les sols» (SIS), d’informer par écrit l’acquéreur ou le locataire de cette situation1. Les SIS, créés par cette même loi, sont élaborés par l’Etat afin d’identifier les terrains où la connaissance de la pollution des sols justifie la réalisation d’études des sols et de mesures de gestion de la pollution pour préserver la sécurité, la santé ou la salubrité publiques et l’environnement. Ces secteurs figurent dans les documents graphiques annexés aux plans locaux d’urbanisme. Toutefois, à ce jour, aucun SIS n’a été élaboré.

Le non-respect de l’obligation pesant sur le vendeur ou le bailleur est sanctionné. Ainsi, si une pollution rendant le terrain impropre à la destination précisée dans le contrat est découverte, l’acquéreur ou le locataire peut demander, dans un délai de deux ans à compter de cette découverte, soit la résolution du contrat, soit la restitution d’une partie du prix de vente ou la réduction du loyer, soit la réhabilitation du terrain lorsque le coût de cette réhabilitation ne paraît pas disproportionné par rapport au prix de vente.

Cette obligation d’information se cumule avec l’obligation posée par l’article L. 514-20 du Code de l’environnement, issu de la loi du 30 juillet 20032, applicable aux seules ventes de terrains. Selon cette disposition, le vendeur du terrain a l’obligation d’informer, le cas échéant, son acquéreur qu’une installation classée soumise à autorisation ou enregistrement a été exploitée sur ledit terrain. A défaut, les mêmes sanctions sont susceptibles de s’appliquer. En pratique, les juridictions n’hésitent pas à sanctionner la méconnaissance de cette obligation3.

Régime issu de la réforme du droit des contrats

Une obligation générale d’information précontractuelle est instituée. Ainsi, le nouvel article 1112-1 du Code civil consacre une obligation d’information déjà largement admise par la jurisprudence et introduit l’existence d’un devoir général d’information d’ordre public, pesant sur chacune des parties, vendeur comme acheteur, à une transaction immobilière, qu’il s’agisse d’un professionnel ou non, dès lors que ladite information est déterminante pour le consentement de l’autre partie qui l’ignorait légitimement jusqu’alors. En cas de non-respect de cette obligation, le débiteur pourra voir sa responsabilité mise en jeu. Si, à première vue, on voit mal comment l’obligation générale d’information de cet article pourrait trouver application dans un domaine – le droit de l’environnement - où le législateur a pris précisément le soin d’identifier les éléments indispensables à une information précontractuelle éclairée du cocontractant, la prudence invite toutefois à nuancer cette impression.

En effet, rien ne permet d’affirmer que les juges considéreront que les informations listées par les textes spéciaux susvisés sont exclusives de toute information susceptible de présenter un caractère déterminant pour le consentement de l’autre partie.

1. Article L. 125-7 du Code de l’environnement.

2. Loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (JO du 31 juillet 2003).

3. Cass, 3e civ., 11 mars 2014, n° 12-29556 ; Cass. 3e civ., 12 janv. 2005, n° 03-18.055, Commune de Dardilly contre Sté des Anciennes briqueteries de Limonest ; Cass. 3e civ., 12 janv. 2005, n° 03-18.055, Commune DARDILLY ; Cass. 3e civ., 7 mars 1990, n° 88-18.714.

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Au sommaire de la lettre


La lettre de l'immobilier

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Géraldine Machinet et Louis Urvois

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