Il est généralement admis de taxer à la TVA les indemnités de résiliation anticipée versées par le bailleur, au motif qu’elles sont la contrepartie du service rendu par le locataire qui accepte de libérer les locaux. Inversement, les indemnités versées par le preneur à l’initiative d’une rupture anticipée du bail ne sont souvent pas taxées car elles ne rémunèrent aucun service individualisé.
par Gaëtan Berger-Picq, avocat associé en fiscalité
Néanmoins, dans un arrêt du 22 novembre 2018 (C 295/17 «MEO») la Cour de justice de l’Union européenne a retenu la taxation à la TVA d’une indemnité versée dans des circonstances où :
– le client était défaillant ;
– cette défaillance avait conduit le prestataire à résilier le contrat par anticipation et à arrêter de fournir les services ;
– le client était contractuellement redevable d’une «indemnité» dont le montant correspondait exactement à la rémunération nette que le prestataire aurait encaissée si le contrat s’était poursuivi jusqu’au terme convenu.
La logique du lien direct et immédiat qui sous-tend la taxation à la TVA aurait dû conduire à un non assujettissement puisqu’il n’y avait plus aucun service et que le client avait commis une faute à l’origine d’un préjudice qu’il devait réparer. La solution contraire retenue par la Cour repose sur une logique économique qui semble retenir que : dès lors que l’indemnité est convenue entre les parties dans contrat initial, elle fait partie de son équilibre économique global et doit donc être taxée à la TVA comme le seraient les services.
Cette argumentation n’est pas isolée dans les récents arrêts de la Cour et incite les bailleurs et preneurs à la plus grande prudence dans la détermination du régime de TVA de leurs indemnités contractuelles.
Dans l’attente d’une clarification de la situation, le sujet n’a pas fini d’empoisonner les négociations et fera les beaux jours des lettres d’accord régissant les remises en cause fréquentes par l’Administration, même entre assujettis récupérateurs de la TVA…