La société par actions simplifiée (SAS) a vingt ans cette année : elle a été créée en 1994. Du point de vue du capital-investissement, elle est en réalité plus jeune : c’est en 1999 que la configuration moderne de cette société a été arrêtée. La formule retenue pour organiser à l’origine des joint-ventures est devenue une structure utilisable tant par des petits créateurs d’entreprise que par des acteurs de taille considérable. Depuis, la SAS a connu un développement incessant dans le temps même où le stock de sociétés anonymes ne cessait de décroître. L’effet de vases communicants n’est pas discuté. On constate aujourd’hui que le nombre des SAS est presque cinq fois plus élevé que celui des sociétés anonymes (SA).
Par Alain Couret, avocat associé.
Des SAS, on peut en trouver dans tous les secteurs de l’économie. Toutefois, on relève une certaine concentration dans le domaine des opérations financières et dans celui des lieux de pouvoir. Elles sont présentes à hauteur de 25 % dans les activités financières et d’assurance. Elles représentent 28 % des sociétés holding et 30 % des sièges sociaux (voir l’excellente étude de P. L. PERIN parue dans «RTDF» n° 3, 2013, p. 65 et suiv.). Même si nous ne disposons pas de statistiques très précises, il est probable que le pourcentage des SAS dans les opérations de capital-investissement soit considérable. Pourquoi un tel succès ? D’abord en raison de la simplicité caractéristique de cette forme sociale. L’avalanche de contraintes qui s’est abattue sur les SA depuis de longues années a détourné de cette forme les créateurs d’affaires qui n’avaient pas besoin d’une cotation en Bourse.
Ensuite en raison du caractère contractuel de la SAS, qui permet de faire du sur-mesure, de créer des situations d’inégalité acceptée, qui permet de donner une réponse spécifique aux aspirations de chacun. Le capital-investissement organise la cohabitation de divers acteurs dont les attentes sont très différenciées. Les statuts de la société peuvent prendre en compte cette différenciation sans qu’il soit toujours nécessaire de recourir à la technique du pacte d’actionnaires. Ou, pour le moins, une répartition peut utilement se faire entre les statuts et le pacte. Succès encore en raison de la souplesse de la gouvernance qui permet aux investisseurs d’exercer un pouvoir rapproché, qui permet à certains de bénéficier d’un droit de veto et à des tiers de détenir d’importantes prérogatives.
Tout ceci n’est pas discutable, encore que l’on tende à oublier que le spectre de la responsabilité se profile derrière tous ces avantages. Ce point sera évoqué dans le dossier, car le succès de la SAS a eu un effet d’atténuation de la perspective des risques qui s’attachent à son utilisation. Ces explications du succès rencontré sont bien connues aujourd’hui. Les thèmes qui ont été choisis pour cette lettre n’en reprennent pas un exposé systématique. Ils s’efforcent plutôt de focaliser l’attention sur des questions souvent moins bien identifiées mais dont l’importance est indubitable pour apprécier les apports de la SAS au capital-investissement.