Les modes de nomination du président ou d’un directeur général d’une SAS sont librement fixés dans les statuts (décision d’un ou de plusieurs associés, décision d’un organe statutaire, etc.). Classiquement, les termes et conditions du mandat social du président ou du directeur général sont décrits dans la décision de l’organe social qui nomme le dirigeant sans avoir à être formalisés dans un document autre que le procès-verbal.
Par Pierre Bonneau, avocat associé, spécialiste en droit social et Alexandre Delhaye, avocat en corporate-M&A.
La pratique, portée par la flexibilité de la SAS, a vu se développer des engagements contractuels prenant la forme de simples lettres, voire de véritables contrats souvent dénommés «contrats de mandat social». Ces engagements sont conclus entre la société ou son associé majoritaire et le futur dirigeant dans le but de «contractualiser» les termes et conditions du mandat social qui ont été négociés. Ce type de contrat, conclu le plus souvent avant la nomination effective du dirigeant, doit faire l’objet de l’approbation formelle de l’organe social compétent de la SAS, ainsi que, dans certaines hypothèses, de la procédure des conventions réglementées dès lors qu’il s’agit d’une convention entre la société et son dirigeant (1). Cette pratique est devenue fréquente lorsqu’il est demandé à un salarié de démissionner pour occuper des fonctions de mandataire social, par exemple dans le cadre d’une opération de LBO dans laquelle un fonds d’investissement souhaiterait engager un manager salarié d’un groupe afin de diriger l’une de ses participations.
Le statut de mandataire social étant par nature moins «protecteur» que celui de salarié, le futur dirigeant sera ainsi conforté par un contrat bilatéral dont le contenu – qui résultera de la négociation – pourra présenter certaines ressemblances avec un contrat de travail : rémunération fixe, rémunération variable et fixation des critères de sa détermination, définition des motifs de révocation, indemnité de révocation, durée du préavis en cas de cessation des fonctions, clause de non-concurrence, protection sociale, prise en charge de certains frais, avantages en nature, assurance GSC, etc., constituent en effet autant de sujets pouvant faire l’objet de stipulations dans ce type de contrat. Il importe toutefois que cette ressemblance avec le contrat de travail ne conduise pas à la reprise de l’élément essentiel constitutif de celui-ci : le lien de subordination. Ce dernier est, rappelons-le, caractérisé par «l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné (2)».
Il convient donc, pour limiter les risques de requalification, d’éviter un encadrement des conditions de l’exercice par le mandataire social de ses responsabilités, via la fixation d’objectifs, des modes de reporting de son activité ou, plus généralement, de toute stipulation qui pourrait constituer une entrave à la liberté dont doit en principe jouir le mandataire social.Ces mêmes précautions doivent être prises non seulement dans la rédaction même du contrat mais également et surtout dans la pratique des relations entre le mandataire social et son associé. La Cour de cassation a ainsi déjà jugé que l’examen de ces relations pouvait conduire à la reconnaissance d’un contrat de travail entre un mandataire social de la société mère et la société du fait de l’existence d’un lien de subordination avec celle-ci (3). La prudence commande donc de limiter l’immixtion de l’associé ou de ses représentants dans la direction d’une société par son mandataire social.
(1). «Mémento Francis Lefebvre Sociétés Commerciales», 2014, n° 60370, p. 896.
(2). Cass. soc., 13 novembre 1996, Bull. civ., V, n° 386, pourvoi n° 94-13187.
(3). Cass. soc., 11 mars 2003, n° 742 FS-PB.