En tant que société par actions, la SAS se distingue de la société anonyme de par son mode d’organisation et de fonctionnement qui relève pour une large part de la seule volonté de ses associés. Plus souple dans sa gestion et d’un formalisme moins rigoureux, cette forme sociale s’est avérée particulièrement intéressante pour les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et les petites et moyennes entreprises (PME).
Par Rosetta Ferrère et Valérie Tessler avocats en marchés de capitaux.
Petit bémol à ce cadre privilégié, un financement sur les marchés obligataires longtemps resté quasi impossible…Jusqu’en 2009, la SAS faisait en effet l’objet d’une interdiction absolue de «faire appel public à l’épargne». Ainsi, même si la SAS pouvait émettre des obligations par décision, en principe, de son président (si les statuts n’en disposaient pas autrement), elle ne pouvait le faire en ayant recours aux marchés financiers. Ce n’est qu’avec la suppression du concept d’appel public à l’épargne par l’ordonnance du 22 janvier 2009 et la création corrélative de deux concepts distincts calqués sur le droit communautaire (l’offre au public et l’admission aux négociations sur un marché réglementé) qu’une brèche a été ouverte permettant l’accès des SAS aux marchés.L’article L. 227-2 du code de commerce modifié par l’ordonnance prévoit qu’une SAS «ne peut procéder à une offre au public de titres financiers ou à l’admission aux négociations sur un marché réglementé de ses actions. Elle peut néanmoins procéder aux offres définies aux 2 et 3 du I et au II de l’article L. 411-2 du code monétaire et financier».
Aujourd’hui, bien qu’une SAS ne puisse toujours pas offrir ses titres (actions ou obligations) au public, elle peut toutefois faire admettre ses obligations aux négociations sur un marché, réglementé ou non, par voie de placement privé, dans les hypothèses suivantes : dès lors qu’elle offre ses obligations pour un montant total par investisseur et par offre dépassant 100 000 euros ou que la valeur nominale des obligations offertes dépasse 100 000 euros, ou qu’elle place exclusivement ses obligations auprès de personnes fournissant le service d’investissement de gestion de portefeuille pour le compte de tiers, d’investisseurs qualifiés agissant pour compte propre ou encore d’un cercle restreint d’investisseurs agissant pour compte propre. D’un point de vue pratique, cependant, l’ouverture créée par le législateur en 2009 s’est longtemps avérée d’un intérêt limité pour les SAS de taille intermédiaire, les PME et ETI n’ayant en réalité qu’un accès restreint, voire inexistant, à un marché obligataire monopolisé par les grandes entreprises notées (le plus souvent cotées) réalisant des émissions de taille significative (généralement d’un montant minimum de 150 000 000 d’euros).
Depuis 2012 et l’avènement de nouveaux modes de financement plus accessibles aux PME et ETI, tels que le placement privé européen (Euro PP) ou la création de fonds de prêt à l’économie (comme les fonds Novo), l’article L. 227-2 du code de commerce a toutefois retrouvé de son intérêt. Et ce, même si parmi ces nouvelles sources de financement celles fondées sur l’appel à l’épargne des ménages (tel que l’Initial Bond Offering ou IBO, récemment lancée par NYSE Euronext) demeurent interdites aux SAS. Ces modes de financement alternatifs ont largement favorisé l’accès au marché obligataire des SAS de taille intermédiaire non notées, souvent non cotées et ayant des besoins d’émission moins importants. Ainsi, Altrad Investment Authority, SAS spécialisée dans le matériel de BTP, a émis son premier Euro PP d’un montant de 100 000 000 d’euros coté sur Euronext Paris en novembre 2013. A la faveur d’un cadre juridique (encore) plus souple et une offre financière plus variée, la SAS peut désormais accéder et se financer efficacement sur les marchés obligataires.