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Octobre 2020

Elections américaines : derrière le «Make America great again» de Donald Trump et le «Made in America» de Joe Biden, deux politiques fiscales très divergentes

Publié le 16 octobre 2020 à 8h23

Par Guillaume Barbier, Avocat, PwC – International Tax French Desk New York USA

Qualifié de «pire débat» de l’histoire des Etats-Unis par de nombreux observateurs américains, le premier débat présidentiel du 29 septembre dernier entre Donald Trump et Joe Biden a mis en avant les divergences des deux candidats concernant notamment la future politique fiscale américaine.

Durant le débat, le président Trump a souligné les chiffres de la croissance économique américaine sous sa présidence ainsi que l’impact de sa réforme fiscale (connue sous le nom de «Tax Cuts and Jobs Act») qui incluait notamment une baisse de l’impôt fédéral sur les sociétés de 35 % à 21 %. Lors de sa campagne 2020, le président Trump a même évoqué une possible baisse de l’impôt sur les sociétés à un taux de 15 % et certaines réductions d’impôt pour les personnes physiques. Un second mandat du président Trump ne devrait pas se traduire par d’autres réformes fiscales majeures.

De son côté, l’ancien vice-président Biden a pour principales propositions de campagne :

– une augmentation de l’impôt fédéral sur les sociétés de 21 % à 28 % ;

– une réforme du régime «Global Intangible Low-Taxed Income» (GILTI) : ce régime, créé en 2017, a pour vocation de décourager l’érosion de la base fiscale américaine en maintenant ou taxant automatiquement des actifs incorporels étrangers et profits non routiniers qu’ils génèrent sur le territoire américain. Ces profits non routiniers sont taxés en bénéficiant d’une déduction de 50 % actuellement et donc un taux d’impôt GILTI de 10,5 %. Le candidat Biden propose de limiter cette déduction à 25 % qui, cumulée à l’augmentation du taux de l’impôt à 28 %, augmenterait le taux de l’impôt GILTI à 21 % ;

– la création d’une taxe minimum de 15 % sur le résultat comptable des sociétés américaines dites «Tax on Global Book Income» pour toutes les sociétés ayant un résultat comptable d’au moins 100 millions de dollars. Le camp Biden n’a fourni que peu de détails sur cette nouvelle taxe, son champ d’application et son mécanisme. A ce stade, cette taxe s’accompagnerait seulement de crédits d’impôts pour impôts payés à l’étranger ainsi que d’un régime de report en avant des déficits ;

– afin d’encourager la production économique domestique et les activités de services, le candidat Biden propose d’instaurer une surtaxe de 10 % à l’impôt sur les sociétés afin de pénaliser les sociétés américaines qui délocaliseraient des emplois de production et de services hors des Etats-Unis, lorsque ces produits ou services sont ensuite vendus ou rendus aux Etats-Unis. Ajouté à l’augmentation du taux d’impôt, le taux d’impôt des sociétés visées atteindrait ainsi 30,8 % ;

– à l’inverse, un crédit d’impôt dit «Made in America tax credit» serait offert aux sociétés qui investiraient, relocaliseraient et créeraient des emplois de production ou services pour des travailleurs américains et aideraient à une accélération de la reprise économique (en lien essentiellement avec la réouverture, le rééquipement, la modernisation d’usines, l’expansion de la production locale, etc.). Ce crédit serait notamment calculé sur la base de l’augmentation globale des salaires pour des emplois manufacturiers rémunérés jusqu’à 100 000 dollars ;

– le programme Biden contient également des mesures prévoyant une augmentation de la fiscalité des personnes physiques. Ces augmentations d’impôts sur les sociétés et les personnes physiques seraient également destinées à financer une énergie verte, un accès élargi des Américains au système de santé, un financement accru des projets d’infrastructure.

En outre, les défis fiscaux liés à la numérisation de l’économie (propositions Piliers 1 et 2 de l’OCDE) pourraient influencer la future politique fiscale américaine. Toutefois, à ce stade, les politiques fiscales des deux candidats laissent entrevoir une certaine continuité dans l’approche des grands sujets fiscaux internationaux notamment en matière de taxation de l’économie numérique. A cet égard, en cas d’élection de Joe Biden, les positions de fond américaines relatives aux taxes numériques unilatérales mises en place par plusieurs pays, comme la France, ne devraient pas changer de façon significative. Les tarifs douaniers mis en place par l’administration Trump, en réplique à ces taxes numériques unilatérales, pourraient donc rester en place même en cas d’élection du candidat Biden.

Au-delà du résultat de l’élection présidentielle, 2021 sera une année clef pour la politique fiscale du vainqueur et fonction de l’évolution des majorités actuelles des partis Républicain et Démocrate à la Chambre des représentants et au Senat américain. 


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