Alors que l’ESS ne concerne que les personnes morales de droit privé du secteur non lucratif (coopératives, mutuelles, associations, fondations et entreprises commerciales d’utilité sociale), la loi PACTE s’applique à toutes les sociétés.
Les coopératives, tout en relevant de droit de l’ESS, doivent donc « prendre en considération les enjeux sociaux et environnementaux » comme l’exige désormais l’article 1833 du Code civil ; c’est la responsabilité sociale et environnementale des sociétés (RSE). Mais elles peuvent également se doter d’une « raison d’être, constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité », comme le permet l’article 1835 du même code et, le cas échéant, opter en sus pour le nouveau statut de « société à mission » en précisant leurs objectifs sociaux et environnementaux dont le suivi sera assuré par un comité de mission interne et la vérification effectuée par un organisme indépendant, en application de l’article 7 de la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération que le législateur a spécialement modifié à cet effet.
Ce faisant, la loi PACTE permet à toutes les sociétés de faire apparaitre dans leurs statuts que le profit n’est plus pour elles leur seule finalité. On a pu alors se demander quel pouvait être l’apport de la loi PACTE pour les entreprises de l’ESS, notamment des coopératives, compte tenu des principes auxquels elles sont déjà soumises (un but autre que le seul partage des bénéfices, une gouvernance démocratique, une obligation de réinvestissement de la majorité des bénéfices et la constitution de réserves obligatoires impartageables).
La loi de 1947 n’est toutefois pas particulièrement diserte sur la dimension RSE des coopératives ni sur les moyens à affecter à la réalisation de leur but coopératif. La loi PACTE leur permet désormais d’y remédier en précisant dans leurs statuts leurs objectifs et engagements sociaux et environnementaux, dans le respect des principes coopératifs et de l’ESS.
Quand les coopératives se saisissent de la loi PACTE
Aussi, nombre d’entre elles ont déjà saisi l’opportunité offerte par la loi PACTE pour modifier leurs statuts en y inscrivant leur raison d’être (Banques Populaires, Crédit Coopératif, Crédit Mutuel Arkéa, Crédit Agricole, Invivo, etc.). Certaines, alors même qu’elles sont déjà soumises à un contrôle de conformité quinquennal dit de « révision coopérative », sont allées plus loin en optant pour le statut de société à mission, comme Invivo qui y a vu une réelle opportunité au motif que « nous y retrouvons toutes nos valeurs coopératives, associées à une définition de l’entreprise en cohérence avec les défis contemporains. Compte tenu des enjeux démographiques, environnementaux et alimentaires de demain, nous avons une réelle conscience de la mission qui est la nôtre : relever le défi de la transformation du monde agricole grâce à des solutions innovantes, responsables et durables, au bénéfice des coopératives, des agriculteurs et des consommateurs mondiaux » (communiqué Invivo du 22 octobre 2020).
Signe des temps : alors que le droit coopératif a été plusieurs fois modifié pour permettre aux coopératives de s’ouvrir, dans certaines limites, à l’économie de marché, ce sont maintenant toutes les sociétés commerciales qui sont incitées par la loi PACTE à emprunter une nouvelle voie jugée aujourd’hui plus vertueuse à mi-chemin entre le capitalisme pur et l’ESS, celle de « l’économie responsable (à côté de l’action publique, de l’ESS, et l’économie de marché), parvenant à concilier le but lucratif et la prise en compte des impacts sociaux et environnementaux » (guide « Loi PACTE, comment passer à la pratique »). Les sociétés commerciales de « droit commun » et les coopératives viennent ainsi à la rencontre les unes des autres !