Beaucoup d’entreprises vont devoir traiter dans les prochaines semaines des problématiques de refinancement complexe, voire de restructuration. Pour les accompagner dans cette phase délicate, elles cherchent dorénavant un profil de directeur financier ayant déjà connu... et surmonté des crises économiques.
Et si pour préparer le monde d’après, les entreprises avaient besoin de ceux qui ont connu le monde d’hier ? Alors qu’avant la crise économique de la Covid-19, les entreprises se permettaient plus de risques dans leurs recrutements, en ayant notamment une attention toute particulière au potentiel et à la diversité des profils, beaucoup d’entre elles ont aujourd’hui décidé, en raison des difficultés financières engendrées par la pandémie, de revenir à des usages de recrutement plus pragmatiques, centrés sur l’expérience des candidats. «S’agissant en particulier des directeurs administratifs et financiers, si certaines entreprises continuent à recruter de jeunes profils à potentiel, beaucoup sont revenues à des usages de recrutement plus systématiques en faisant le choix de l’expérience et de dirigeants qui ont déjà traversé des crises brutales», observe Julien Badiola, senior client partner au sein du cabinet de recrutement Korn Ferry.
Des profils plus coûteux
En effet, dans un contexte où la notion de performance a laissé sa place de priorité numéro 1 à celle de survie financière, nul doute que le directeur financier joue aujourd’hui un rôle central dans l’action de reconquête économique des entreprises. «L’histoire des crises a montré que certains directeurs administratifs et financiers ont largement contribué à la sauvegarde de leur entreprise, notamment grâce à leur capacité à gérer des opérations complexes de refinancement», poursuit Julien Badiola.
Parmi les profils particulièrement ciblés figurent notamment des personnalités qui s’appuient sur un réseau bancaire solide ou qui ont une expérience des restructurations, en particulier avec l’administration fiscale.
Il faut dire que les tendances de recrutement évoluent toujours en fonction de la conjoncture. Or, avec l’ampleur de la crise économique qui touche actuellement les entreprises, celles-ci sont à la recherche de compétences solides, d’experts capables d’être opérationnels immédiatement et de s’adapter à n’importe quel changement de situation comme... des confinements à répétition.Aussi, les profils de dirigeants ou de directeurs financiers ayant déjà piloté des crises, notamment celle de 2008, sont très prisés selon les recruteurs. «Les dirigeants se rassurent en recrutant des directeurs financiers qui ont des réflexes car ils ont déjà exercé leur métier dans un contexte similaire», constate Julien Badiola. Parmi les profils particulièrement ciblés figurent notamment des personnalités qui s’appuient sur un réseau bancaire solide (directeurs financiers qui sont d’anciens banquiers, par exemple) ou qui ont une expérience des restructurations, notamment avec l’administration fiscale.
En 2020, une entreprise a déboursé en moyenne entre 1300 et 2500 euros par jour pour louer, en France, les services d’un directeur financier de transition, selon l’étude européenne management de transition réalisée par le cabinet Robert Walters.
L’alternative des managers de transition
Pour attirer de tels candidats, les entreprises doivent toutefois se préparer à consentir à un effort financier. En effet, ces dernières vont être contraintes de débaucher des profils déjà en poste, ce qui se traduira pour elles, malgré la crise, par un investissement important: parfois plus de 150 000 euros de salaire par an. «Une politique de réduction des coûts impose souvent une réflexion sur les recrutements en cours et à venir», souligne Mikael Deiller, directeur finance et comptabilité chez Michael Page. Cet investissement risque d’être d’autant plus élevé que toutes les entreprises recherchent au même moment le même type de profils, ce qui favorise une hausse des salaires. Dans ce contexte, certaines s’interrogent : «De nombreuses entreprises hésitent aujourd’hui entre le recrutement d’un directeur administratif et financier qui aurait connu une crise similaire, quitte à ce qu’il ne réponde pas au contexte de l’après-crise, et des solutions plus flexibles telles que le management de transition ou le consulting, observe Julien Badiola. Ces dernières solutions présentent par ailleurs les avantages du moindre investissement à moyen terme et de la disponibilité quasi immédiate.» Une solution intermédiaire qui pourrait bien séduire les entreprises mais qui représente là encore un coût. En 2020, une entreprise a déboursé en moyenne entre 1 300 et 2 500 euros par jour pour louer, en France, les services d’un directeur financier de transition, selon l’étude européenne management de transition réalisée par le cabinet Robert Walters.
Une accélération de la digitalisation des tâches comptables
Le télétravail imposé par la pandémie de Covid-19 pourrait bien forcer les dernières entreprises réfractaires à adopter des outils numériques de comptabilité et à se mettre à l’heure du digital. En effet, alors que les directions financières fonctionnaient il y a encore quelques mois avec, par exemple, des factures fournisseurs papier, le confinement les a contraintes à revoir leurs méthodes et à dématérialiser leurs procédures de paiement. «Un des points positifs du confinement est qu’il a donné un véritable coup d’accélérateur à la digitalisation comptable des entreprises», se félicite Mikael Deiller, directeur finance et comptabilité chez Michael Page. Une tendance constatée notamment dans les PME pour qui l’automatisation des procédures comptables n’était jusqu’ici pas prioritaire.