Avec les accords sur le partage de la valeur qui se profilent, les opportunités d’épargne et de placement vont se multiplier pour les salariés, notamment dans les PME et les TPE. La réussite de ces dispositifs dépendra de la capacité à convaincre les chefs d’entreprise de leur bien-fondé, et donc de leur proposer les supports d’investissement adéquats.
« Le gouvernement semble vouloir reprendre le projet d’accord national interprofessionnel (ANI) sur le partage de la valeur. Ce texte présente une certaine souplesse. Dans les PME et les TPE, il devrait ouvrir de nouvelles possibilités d’investissement pour la prime PEPA (prime exceptionnelle de pouvoir d’achat), ou PPV (prime de partage de la valeur), également dite “prime Macron” », explique Mathieu Chauvin, président d’Eres group. Société de conseil et de gestion, Eres accompagne déjà les TPE et les PME dans la mise en place de dispositifs d’épargne retraite et salariale, au travers d’un réseau de partenaires : des experts-comptables, courtiers et conseillers en gestion de patrimoine indépendants.
Si Mathieu Chauvin se réjouit à l’idée que la PPV puisse être logée dans des dispositifs d’épargne salariale, il voit poindre une nouvelle complexité que le gouvernement devrait anticiper. « A partir de 2024, la PPV sera fiscalisée pour les entreprises de plus de 50 salariés, mais ne le serait pas pour les entreprises de moins de 50 salariés. Nous estimons qu’elle devrait être exemptée d’imposition si elle est logée dans un dispositif d’épargne salariale quelle que soit la taille de l’entreprise, évitant ainsi encore une fois un régime à deux vitesses difficile à comprendre et à expliquer. » Cette prime, plus simple que l’intéressement, qui est adossé à des critères, ou que la participation, liée à la performance de l’entreprise, est une opportunité de générer de nouveaux flux d’épargne.
Embarquer PME et TPE
Tout comme il a fallu effectuer un travail de pédagogie après la loi Pacte, il faudra accompagner les entreprises dans la mise en place des dispositifs de partage de la valeur. « Au sein des grands groupes, ce sujet revient aux DRH. Mais dans les TPE et les PME, ce sont les dirigeants qu’il faut convaincre. L’expert-comptable joue alors un rôle de conseil majeur, puis les courtiers et les CGP sont indispensables pour réussir à décliner le produit d’épargne. » Une intermédiation que Mathieu Chauvin juge bénéfique, car il constate que les dispositifs d’épargne salariale des grandes structures sont souvent pauvres en fonds et peu diversifiés, faute de capacité des RH à accompagner sur ces sujets.
Eres a donc fait le choix de proposer aux entreprises une gamme d’une soixantaine de fonds en multigestion, disponibles dans l’offre PEI PERECOI « Eres Sélection ». Une façon de rendre accessible, grâce à cette offre « clé en main », aussi bien toutes les grandes maisons de gestion que les classes d’actifs ouvertes à l’investissement, notamment l’immobilier et le private equity. « Les dirigeants de TPE se rendent compte qu’il est financièrement beaucoup plus avantageux pour eux aussi d’investir dans le cadre de l’épargne collective plutôt qu’individuelle. Outre les caractéristiques fiscales et le principe de l’abondement, l’offre est suffisamment large pour pouvoir construire une véritable stratégie patrimoniale », confie le président d’Eres group.
Il est évidemment possible de sortir de l’offre Eres Sélection, pour retenir un nombre de fonds plus restreint. Néanmoins, cela signifie sortir du cadre des accords interentreprises qui permet l’application systématique de toutes les contraintes réglementaires, comme par exemple l’introduction d’un type de fonds spécifique dans l’épargne salariale. En dehors d’un accord interentreprise, la société doit réaliser un avenant à son contrat d’épargne salariale et le déposer à la direction du travail. Des contraintes lourdes pour pouvoir être en conformité avec les évolutions de la réglementation.
Autre possibilité de l’épargne salariale à valoriser, celle d’appliquer la gestion pilotée non seulement sur l’épargne retraite mais aussi sur les plans d’épargne entreprise. Comme les horizons de placement sont plus courts, le pilotage n’est pas destiné à sécuriser l’épargne, mais plutôt la performance. « Nous avons une grille de gestion pilotée qui propose un rebalancement trimestriel pour suivre l’allocation stratégique définie en amont, explique Mathieu Chauvin. Le mécanisme permet de sécuriser la plus-value après une hausse des marchés et de réinvestir dans les phases de baisse. »
Ouvrir l’horizon sur l’actionnariat salarié
La loi sur le partage de la valeur devrait également permettre de rendre plus accessibles des dispositifs existants mais méconnus, notamment en matière d’actionnariat salarié. C’est le cas d’un véhicule appelé FCPE de reprise. Il n’est que rarement mis en place car, contrairement à ce que son nom laisse entendre, il n’implique pas forcément un contrôle de la société par les salariés. « Ce dispositif est conçu pour faire partie de l’épargne salariale et celle-ci y est bloquée pendant a minima trois ans. La particularité est que le FCPE de reprise n’est pas accessible à tous les salariés. Il a pour objectif de réunir un cercle de collaborateurs au sein d’un fonds aux règles spécifiques », précise Mathieu Chauvin. Bien sûr, l’objectif final peut être de conduire progressivement à une reprise de la société par les salariés. Le FCPE de reprise s’avère alors un outil utile face à des scénarios de transmission souvent complexes pour des chefs d’entreprise. Mais il peut aussi être utilisé comme un instrument permettant d’associer les collaborateurs clés, et donc de mettre en place un système de partage de la valeur, insiste Mathieu Chauvin. « Tout outil qui sert l’actionnariat salarié mériterait d’être plus lisible et visible. Comme le démontre notre baromètre* sur le sujet, il n’y a encore que 9 % de salariés associés au capital des entreprises non cotées, contre 75 % au sein des entreprises du SBF 120, en 2022. »
Questions à… Mathieu Chauvin, président, Eres group
Mathieu Chauvin travaille depuis plus de vingt ans dans le secteur de l’épargne salariale. Il a rejoint Eres group en 2007, tout juste après sa création. En 2019, il prend la direction executive du groupe avec Pierre-Emmanuel Sassonia et Alexis de Rozières. Aux côtés des équipes de spécialistes qui composent le groupe Eres, il a participé à la naissance puis à l’hypercroissance de cette société spécialisée en épargne longue.
La loi Pacte a élargi les classes d’actifs ouvertes à l’épargne salariale. Lesquelles vous semblent intéressantes ?
Il faut profiter de la possibilité d’investir sur l’immobilier, nous avons d’ailleurs quatre fonds dédiés à cet actif. Outre ce segment attractif, mais relativement classique, nous pensons que les investisseurs devraient se saisir de l’opportunité d’investir sur le private equity avec leur épargne salariale. C’est pourquoi nous lançons un nouveau fonds dans nos PER d’entreprise, Eres Private Solution, dont l’allocation pourra aller jusqu’à 50 % de private equity, ce qui est supérieur à ce que l’on trouve pour le moment sur le marché.
Est-il également important d’avoir une offre de fonds ISR ?
Tout à fait, car on observe un certain succès des fonds ISR. Il est un peu tôt pour juger de la solidité de l’appétence des investisseurs pour l’ISR sur le long terme, néanmoins cela devient un incontournable : l’ISR figure en tête des critères de tous les appels d’offres auxquels nous répondons. Les gammes de fonds ISR devraient d’ailleurs continuer de s’étoffer, car un certain nombre de fonds articles SFDR 6 ou 7 travaillent à devenir article 8.
Face à une offre ISR croissante, comment opérer une sélection ?
Nous proposons une gamme complète d’investissement ISR à travers le PEI PERECOI « Eres Conviction », avec des fonds labellisés sur toutes les classes d’actifs et une gestion pilotée ISR. Deux de nos fonds sont notamment membres du collectif 1 % pour la planète. Toutes les solutions d’épargne salariale peuvent être élaborées en ISR. En revanche, il est vrai que cela demande de la sélectivité, c’est pour cela que nous avons développé une méthodologie propriétaire. Il n’est pas question de se fier uniquement aux labels, nos équipes mènent leurs propres analyses et accordent notamment une grande attention à la qualité des équipes et à la manière dont les process ISR sont déployés dans la gestion. Nous avons aussi fait le choix de rester à l’écart des fonds article 9 pour le moment, d’autant qu’un certain nombre d’entre eux se sont récemment vus requalifiés en article 8.