Réforme des retraites, développement de l’intelligence artificielle, émergence des crypto-actifs et des monnaies digitales de banque centrale… Que ce soit au sein de ses commissions ou au travers des travaux de jeunes chercheurs qu’elle accompagne, l’Association française des investisseurs institutionnels (Af2i) aborde au quotidien un ensemble de thématiques extrêmement variées. Parmi elles, il y en a une qui, tout particulièrement, prend une place grandissante, année après année : la finance durable.
L’armement et la finance durable sont-ils compatibles ?
Récemment, l’Af2i s’est interrogée sur la compatibilité entre une démarche d’investissement ESG et le financement de l’industrie de la défense. Au cœur des débats des instances européennes qui travaillent actuellement à l’élaboration de la future taxonomie sociale, cette question revêt une dimension centrale depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine, en février 2022. « La question qui se pose est la suivante : est-ce que les réglementations ESG interdisent le financement de l’industrie de défense ? Au sein d’un groupe de travail de la commission Investissement responsable, nous avons analysé la taxonomie, le règlement SFDR et la directive CSRD. Dans tous ces textes, nous n’avons pas vu d’interdiction formelle ou même indirecte », constate Joël Prohin, directeur du pôle gestion des portefeuilles à la Caisse des Dépôts. Néanmoins, face aux difficultés auxquelles les investisseurs pourraient être confrontés en se positionnant sur ce secteur, l’Af2i a publié un document dans lequel sont fournies des pistes d’aide à la décision. « Je les résumerai en deux filtres, poursuit Joël Prohin. Un filtre ESG standard, parce que les entreprises de défense sont des entreprises comme les autres, et donc il convient que les bons critères et les bonnes pratiques, à la fois en termes d’environnement, en termes sociaux et en termes de gouvernance soient respectés. Mais il est nécessaire, au regard des spécificités du secteur, d’ajouter une approche ESG spécifique, selon laquelle les entreprises doivent exclure les armes controversées, avoir une bonne appréciation des traités internationaux pour les appliquer, en particulier des traités qui concernent les armes controversées, etc. »
Un questionnaire ESG multi-classes d’actifs
En parallèle, la commission Investissement responsable a également élaboré un questionnaire ESG, destiné à simplifier la réalisation des reportings « article 29 » de la loi Energie climat. « Nous avons voulu faire converger l’ensemble des questionnaires du groupe de travail des membres de l’Af2i et développer un questionnaire ESG qui soit multi-classes d’actifs, afin non seulement de faciliter la sélection des fonds et des sociétés de gestion sur des critères ESG, mais aussi de faciliter l’élaboration des reportings ESG, qui sont de plus en plus nombreux à être demandés aux institutionnels », indique Jean-Bernard Ott, responsable allocation et politique ESG de la Caisse d’assurance vieillesse des pharmaciens. Autre illustration de cette montée en puissance de la finance durable dans son agenda, l’Af2i vient de rejoindre le bureau exécutif de l’Institut de la finance durable. « Cette instance vient de succéder à Finance for Tomorrow, organisation créée par Paris Europlace au sein de laquelle nous travaillions depuis 2021 sur la définition de la finance à impact », évoque Hubert Rodarie, président de l’Af2i. En outre, l’association participera, en décembre prochain, à la deuxième édition des Entretiens de la finance durable, créés à l’initiative de l’Association française de finance (AFFI). « Ces entretiens, auxquels participe activement notre commission Recherche, permettent de confronter des professionnels et des universitaires ou chercheurs de nos membres partenaires », insiste Hubert Rodarie.