L’amende que pourrait avoir à payer BNP Paribas pour avoir enfreint les règles d’embargo américaines suscite un tollé dans la communauté économique française. Au-delà de son montant, exorbitant, elle soulève surtout la question de la légitimité des Etats-Unis à vouloir faire respecter, souvent unilatéralement, leurs propres règles partout dans le monde, notamment dans un domaine aussi stratégique et concurrentiel que celui de la finance.
«Ce qui se passe avec BNP Paribas est incroyable : l’Europe devrait menacer les Etats-Unis de cesser toutes ses transactions commerciales en dollars et de les libeller en euros !» Cette réaction «à chaud» d’un grand patron du CAC 40 traduit bien l’incrédulité teintée d’exaspération avec laquelle la communauté financière française a accueilli les menaces de sanctions visant la banque française de la part des autorités américaines. Incriminée pour des transactions en dollars effectuées entre 2002 et 2009 au profit de personnes morales et physiques résidant dans des pays placés sous embargo par les Etats-Unis (Iran, Soudan, Cuba…), BNP Paribas pourrait avoir à régler une amende de 10 milliards de dollars, la plus élevée jamais infligée à une banque étrangère. Un chiffre qui a suffi à transformer le différend en affaire d’Etat : plus encore que le montant pharamineux de l’amende, c’est sa justification qui pose problème, dans la mesure où elle semble témoigner moins d’une volonté de rendre classiquement justice que d’imposer une vision unilatérale et hégémonique des relations économiques et financières.«On peut se demander si la justice américaine n’est pas en train de devenir un tribunal économique mondial», s’interrogeait ainsi la semaine dernière l’avocat Daniel Soulez Larivière dans nos colonnes. Un tribunal soupçonné, qui plus est, de fonctionner au profit des seuls intérêts de son pays.
Une sanction jugée disproportionnée
Sur le fond, pourtant, ce n’est pas le fait qu’un tel établissement puisse être...