Si, en 25 ans, la libéralisation et la globalisation des économies ont amplifié les cycles, la crise actuelle résulte avant tout de politiques budgétaires et monétaires inadaptées, estime Denis Kessler. Pour le PDG de Scor, les déséquilibres structurels n’ont toujours pas été résolus, au risque, s’ils persistent, de renforcer le populisme et le protectionnisme.
En vingt-cinq ans, le monde financier a connu un développement sans précédent, mais aussi plusieurs crises, dont une majeure. Comment jugez-vous globalement la période ?
Denis Kessler, président-directeur général de Scor : Il faut d’abord rappeler que le cycle financier est un cycle que l’on pourrait qualifier de «naturel», que l’on retrouve dans toutes les périodes de l’Histoire. On a toujours tendance à considérer qu’un cycle est anormal, déviant, et que la norme doit être la stabilité, ou la constance. La stabilité financière n’a jamais existé ! Les économies de marché sont intrinsèquement cycliques.
Nous avons vécu un cycle financier entre le début des années 1980 et aujourd’hui, assorti de fluctuations. Et on peut affirmer que quelles que soient les nouvelles régulations, il y aura à l’avenir de nouveaux cycles. Notamment parce qu’un cycle s’auto-entretient en partie, en alternant des périodes d’expansion extrêmement forte du crédit et de la dette et des périodes de désendettement, avec des corrections plus ou moins brutales.
Ces cycles ne se sont-ils pas accélérés ces dernières années ?
Denis Kessler : L’évolution structurelle majeure des dernières décennies, c’est la globalisation. Les pays participant à l’économie de marché sont beaucoup plus nombreux, ce qui entraîne davantage d’interactions, donc de fluctuations. On l’a vu par exemple dans le domaine bancaire : ces activités, qui avaient autrefois une dimension essentiellement nationale, ont pris une envergure mondiale, notamment en ce qui concerne la banque de financement et d’investissement. La globalisation entraîne une multiplication des intervenants et un élargissement des marchés, qui interagissent et alimentent les fluctuations. Cette...