Dans le cadre d’OPA, les administrateurs d’entreprises cibles sont régulièrement visés par des pressions ou, beaucoup plus rarement, par des actions en responsabilité. La loi Florange, entrée en vigueur en 2014, a renforcé leur protection et élargi leurs marges de manœuvre. Sans déminer totalement, toutefois, le terrain sur lequel ils évoluent.
En mars dernier, l’annonce d’un déclenchement par Veolia de plusieurs actions en responsabilité à l’encontre des administrateurs de Suez a sidéré le marché et les experts du droit boursier. « En trente ans de carrière, je n’avais jamais vu d’assaillant prendre une telle initiative dans le cadre d’une OPA », affirme un praticien. Certes, l’attaque inédite de Veolia (que l’entreprise, sollicitée, n’a pas confirmée) est survenue en réponse à l’activation, par le conseil d’administration de sa cible, de la fondation de droit néerlandais dans laquelle la filiale Suez Eau France était sanctuarisée depuis octobre 2020, une disposition elle-même tout à fait exceptionnelle… Mais, bien qu’annulée par le rapprochement des deux groupes, cette offensive supposée a par ailleurs rappelé à quel point les administrateurs de sociétés ciblées par des OPA sont exposés à des pressions.
Celles-ci peuvent émaner de différentes sources. Il n’est pas rare, d’abord, que les concurrents de l’assaillant intéressés eux aussi par la cible en soient les instigateurs. « L’année dernière, les administrateurs d’une société visée par une OPA examinaient l’offre du raider et s’apprêtaient à rendre leur avis sur la question conformément aux dispositions prévues par la loi, quand ils ont reçu une lettre d’un concurrent de l’assaillant les enjoignant de passer en revue sa propre contre-offre sous peine de poursuite pour manquement à leurs obligations fiduciaires, raconte un avocat. Alors même que la loi n’impose...