«S’il s’agit d’une immobilisation […], l’imposition évite un reversement de la TVA antérieurement déduite ou confère un droit à déduction complémentaire si la taxe afférente à l’achat n’a pas été récupérée ou partiellement déduite.»
Par Armelle Abadie, avocat counsel en fiscalité. Elle conseille et assiste les entreprises, notamment en immobilier, dans l’ensemble des sujets relatifs à la TVA ainsi que dans le suivi et la gestion de contrôles fiscaux et de contentieux. armelle.abadie@cms-fl.com
La réforme de 2010 a introduit, sous l’article 260-5° bis Code général des impôts (CGI), la possibilité pour les vendeurs d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans et de terrains non à bâtir, d’opter pour l’imposition de leur cession à la TVA et d‘écarter ainsi l’exonération prévue par l’article 261-5 du même code.
Fréquemment retenue entre professionnels en mesure de déduire la TVA, l’option pour la taxation de la vente est ouverte à tous les assujettis agissant en tant que tels et doit être formulée dans l’acte constatant la mutation. Elle s’exerce de manière distincte par immeuble, fraction d’immeuble ou droit immobilier relevant d’un même régime pour la détermination de la base d’imposition (CGI, annexe II, article 201 quater).
En cas d’exercice de l’option sur la vente d’un immeuble ancien, la TVA est due sur le prix total si son acquisition par le cédant a ouvert droit à déduction, ou sur la marge dans la situation inverse, pour autant, selon l’administration fiscale qui vient de recevoir le renfort du Conseil d’Etat par son arrêt du 27 mars 2020 (n° 428234), que le bien vendu soit de même nature juridique que celui qui avait été acquis. En revanche, si la vente porte sur un terrain non constructible, la TVA s’applique sur le prix total en cas d’option.
L’option pour la taxation volontaire de la vente à la TVA ne peut conduire à y soumettre les opérations qui caractérisent une transmission d’une universalité totale ou partielle de biens bénéficiant de la dispense d’imposition de plein droit prévue à l’article 257 bis du CGI, i.e. lorsque la vente de l’immeuble s’accompagne de la transmission de l’activité locative qui lui est attachée.
Au-delà des modalités pratiques, quels sont les critères à retenir pour décider d’exercer ou non l’option pour l’imposition ?
Pour les droits de mutation, il faut tout d’abord rappeler que l’imposition à la TVA sur option n’a d’incidence ni sur le régime, ni sur leur assiette.
En ce qui concerne la TVA, les parties trouveront avantage à en apprécier les conséquences pour chacune d’entre elles, même si la situation de l’acquéreur au regard du droit à déduction est déterminante.
Pour le vendeur, les avantages de l’option sont multiples et diffèrent selon ses facultés de déduction et la nature de l’immeuble cédé.
S’il s’agit d’une immobilisation cédée dans le délai de régularisation, l’imposition évite un reversement de la TVA antérieurement déduite ou confère un droit à déduction complémentaire si la taxe afférente à l’achat n’a pas été récupérée ou partiellement déduite. Si l’acquéreur exerce une activité imposable, la TVA supportée est intégralement déductible. Celle qui lui serait transférée le serait également mais serait retenue dans l’assiette des droits de mutation.
Si l’immeuble est inscrit en stock chez le vendeur (opération d’achat-revente), l’option lui permet de déduire la taxe grevant les dépenses engagées en amont de la cession, même si ce droit ne peut être exercé qu’au moment de la vente, ce qui entraîne dans l’intervalle un portage de trésorerie.
Rappelons enfin que la vente d’un immeuble en stock soumise à la TVA par option procure un chiffre d’affaires retenu pour le calcul du coefficient de taxation forfaitaire qui impacte favorablement le montant de taxe déductible au titre des frais généraux et réduit l’exposition du cédant à la taxe sur les salaires. Une opération exonérée dégrade ces deux rapports et prive le vendeur de la faculté de déduire la taxe afférente aux frais engagés à cette fin.
On le voit, le régime d’option ouvert aux opérateurs offre une souplesse qui permet de répondre au mieux aux intérêts du vendeur et de l’acquéreur mais nécessite une véritable expertise des mécanismes de la TVA qui doivent être mis en œuvre.