Si les lois fiscales pouvaient s’exprimer, beaucoup témoigneraient des vicissitudes subies. Il en serait ainsi de l’article 239 ter du Code général des impôts permettant aux sociétés civiles immobilières (SCI) de construction-vente d’être soumises non à l’impôt sur les sociétés (IS) mais à «l’impôt sur le revenu» (IR) malgré le caractère fiscalement commercial de cette activité.
Depuis 54 ans, les opérations les plus variées (ventes de résidences équipées, de terrains finalement non construits, locations d’immeubles construits et non cédés) sont soumises à un juge fiscal de plus en plus favorable, tandis que, simultanément, ce même juge apprécie avec une rigueur accrue l’objet statutaire de construction-vente requis de ces SCI, allant jusqu’à exclure de ce régime (et soumettre à l’IS) une SCI ayant réellement construit et vendu, mais en un lieu autre que celui visé dans ses statuts (cf. article «SCI de construction-vente : rien n’est simple, tout se complique ?», Lettre de l’Immobilier n° 46, lundi 18 septembre 2017, page 15, arrêt du 1er juin 2017).
Cet écart d’appréciation entre les conditions de fond et de forme a induit nombre de litiges à «front renversé» : confrontés à des rectifications d’IR, les SCI et leurs associés s’estiment déchus du régime de l’article 239 ter (et soumis à l’IS), dans l’espoir qu’à l’issue d’une procédure fiscale favorable, l’administration fiscale soit hors délai pour réclamer cet IS.
Mais le 29 mai 2019 (n° 412.500), le Conseil d’Etat, cassant l’arrêt précité de 2017, a confirmé que le régime de l’article 239 ter ne requiert formellement que les mentions statutaires d’un objet de construction-vente (peu important la localisation réelle de celle-ci), d’une forme civile originelle et d’une responsabilité indéfinie des associés.
Ainsi, outre ces trois conditions de forme, ce régime s’appliquera si les opérations réellement réalisées sont celles de construction-vente, celles commerciales accessoires et nécessaires à celles-ci, et toutes celles fiscalement civiles.