Le champ d’application de la loi de 1989 (art. 2) n’est pas modifié mais précisé : la location de locaux à usage d’habitation ou à usage mixte professionnel et d’habitation doit constituer la résidence principale du preneur, c’est-à-dire être le logement occupé au moins huit mois par an, soit par le preneur ou son conjoint, soit par une personne à charge (les enfants, les ascendants de plus de 65 ans ayant de faibles ressources et les parents handicapés), sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure.
Par Brigitte Gauclère, avocat spécialisé en droit immobilier.Elle intervient tant en conseil qu’en contentieux dans les différents régimes locatifs : les baux d’habitation, les baux professionnels et les baux commerciaux.
L’entrée en vigueur de la loi ALUR se fait par étapes. Certaines dispositions s’appliquent immédiatement aux baux en cours. D’autres ne s’appliquent que pour les contrats de location signés après le 27 mars 2014. D’autres enfin ne s’appliqueront qu’après la parution de décrets en Conseil d’Etat ou après une certaine date. Il en sera ainsi du contenu du dossier de diagnostic technique, de l’encadrement et de la répartition des frais d’agence immobilière, du contenu du dossier du candidat locataire, du contrat de bail type et de l’état des lieux type, de l’encadrement des loyers dans certaines agglomérations où sera défini un loyer de référence, de la communication dématérialisée des quittances et du récapitulatif des charges à compter du 1er septembre 2015 et de la garantie universelle des loyers prévue pour entrer en vigueur le 1er janvier 2016. D’ores et déjà, les nouveaux baux doivent mentionner, en sus de ce que disposait déjà la loi de 1989 modifiée, le nom du locataire (!), les équipements d’accès aux technologies de l’information et de la communication, la surface habitable de la chose louée telle que définie par l’article R. 111-2 al. 2 et 3 du Code de la construction et de l’habitation, étant précisé qu’un écart supérieur ou égal à 1/20e pourra entraîner une diminution du loyer proportionnelle à l’écart constaté (art. 3-1).
Le locataire pourra demander au bailleur ou à son mandataire de compléter l’état des lieux dans un délai de dix jours à compter de son établissement et, en cas de refus, il pourra saisir la commission départementale de conciliation (art. 3-2). En outre, les états des lieux d’entrée et de sortie seront complétés par le bailleur par des relevés des index pour chaque énergie en présence d’une installation de chauffage ou d’eau chaude sanitaire individuelle, ou collective avec un comptage individuel.Le bailleur ne pourra plus imposer au locataire de souscrire un contrat pour la location d’équipements des lieux loués en plus du loyer (art. 4).Les obligations auxquelles est tenu le locataire (art. 7) sont amendées. Le paiement partiel du loyer par le locataire, réalisé en application des articles L. 542-2 et L. 831-3 du Code de la sécurité sociale (allocation de logement), ne peut pas être considéré comme un défaut de paiement. Les modalités de prise en compte de la vétusté des biens loués, laquelle exonère le locataire de son obligation de supporter l’entretien des lieux et les réparations locatives, seront déterminées par décret, étant précisé que le locataire d’un organisme HLM pourra exiger l’application des grilles de vétusté établies à la suite d’un accord avec les représentants des locataires.
Le locataire doit laisser l’accès aux lieux loués pour la réalisation de certains travaux, mais ces travaux ne pourront intervenir qu’après remise en mains propres au locataire ou notification d’une note de travaux précisant la nature et les modalités d’exécution de ceux-ci, étant indiqué qu’au-delà de 21 jours, le locataire pourra demander une indemnité. Enfin, si le locataire ne s’assure pas, après mise en demeure, le bailleur pourra souscrire l’assurance contre les risques locatifs pour compte du locataire aux frais de ce dernier.La loi précise désormais que l’obligation de remettre une quittance s’impose également au mandataire du bailleur mais aussi qu’aucun frais lié à la gestion de l’avis d’échéance ou de la quittance ne peut être facturé au locataire (art. 21). La révision du loyer n’est plus automatique, même si le bail le prévoit. Lorsque le contrat envisage la révision du loyer, celle-ci n’est applicable que si le bailleur manifeste sa volonté de réviser le loyer, cette révision ne prenant effet qu’à compter de sa demande. A défaut pour le bailleur d’en avoir fait la demande dans le délai d’un an suivant sa date de prise d’effet, aucune révision ne pourra être appliquée.
Concernant les charges locatives, faute pour celles-ci d’être individualisées, le bailleur devra communiquer, un mois avant leur régularisation, une note d’information sur les modalités de calcul des charges de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire collectifs. Pendant six mois à compter de l’envoi du décompte, les pièces justificatives doivent être tenues à disposition des locataires «dans des conditions normales». La loi précise désormais que, si la régularisation des charges n’a pas été effectuée avant le terme de l’année civile suivant l’année de leur exigibilité, le locataire pourra demander à payer le montant dû en douze mensualités.Si le locataire sous-loue les lieux loués, il devra transmettre au sous-locataire l’autorisation écrite du bailleur et la copie de son bail en cours (art. 9).La loi crée le régime de la colocation qui est définie comme la location d’un même logement par plusieurs locataires, constituant leur résidence principale, qu’il y ait établissement d’un contrat unique ou de plusieurs contrats entre les locataires et le bailleur (article 8-1). Enfin, la procédure à suivre pour les congés collectifs (opération dite encore de vente à la découpe) s’impose désormais pour toute vente par lots de plus de cinq logements dans le même immeuble (article 11-1).
Bénéficient par ailleurs d’une prorogation de plein droit d’une durée de trois ans de plus que leur durée contractuelle ou légale antérieure, les baux en cours dépendant d’un immeuble indivis mis en copropriété situé dans une zone d’urbanisation définie par décret en Conseil d’Etat et ayant cinq locaux d’habitation ou plus (art. 11-2). Les modalités de congé sont également modifiées. Ainsi, les hypothèses dans lesquelles le locataire peut prétendre à un délai de préavis d’un mois sont élargies (art. 15 I-b) et les conditions à remplir par le locataire pour bénéficier de l’offre d’un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités en cas de congé pour habiter ou vendre sont modifiées (art. 15 III). Lorsqu’il s’agit d’un congé de reprise pour habiter, le bailleur doit désormais justifier du caractère réel et sérieux de sa demande. Tout congé justifié frauduleusement par la décision de reprendre ou de vendre le logement sera puni d’une amende pénale (art. 15 IV).
En cas d’acquisition d’un bien occupé, tout congé pour vente n’est autorisé qu’à compter du terme du premier renouvellement du bail en cours et tout congé pour reprise n’est autorisé qu’à compter du terme du bail en cours ou, si le terme du bail intervient moins de deux ans après l’acquisition, après un délai de deux ans (art. 15 I). La faculté pour un bailleur de donner congé à un locataire et la durée du bail peuvent être suspendues dans certaines hypothèses tenant à l’insalubrité ou à la menace de ruine des lieux loués (art. 15 I). Les modalités de restitution du dépôt de garantie sont aménagées dans l’intérêt du locataire (art. 22).Enfin, toutes actions dérivées d’un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer ce droit et l’action en révision du loyer par le bailleur est prescrite un an après la date convenue par les parties dans le contrat de bail pour réviser le loyer (art. 7-1).