Un nouveau partenariat fiscal en faveur des ETI et des grandes entreprises a été institué en mars 2019 afin d’offrir plus de sécurité juridique aux entreprises tout en retenant une approche plus ciblée et moins lourde que les programmes précédents qui avaient rencontré un succès mitigé. Ce partenariat fait partie des sept dispositifs mis en place afin d’instaurer une relation de confiance renforcée entre l’administration et les contribuables.
Par Catherine Cassan, avocat, associée PwC Société d’Avocats et et Alexa Lecoeur, avocat, associée PwC Société d’Avocats
Deux ans après ce sont 43 partenariats qui ont été signés entre l’administration et les grandes entreprises et 81 rescrits qui ont été délivrés dans ce cadre (Gouvernement, dossier de presse, 8 mars 2021, DGFiP et URSSAF).
Pour entrer dans cette relation de confiance les entreprises candidates doivent répondre à des critères de conformité fiscale et de coopération avec l’administration fiscale. Ainsi, pour être éligible, l’entreprise doit avoir respecté, au cours des trois années précédant celle du dépôt de sa candidature l’ensemble de ses obligations déclaratives et documentaires en matière fiscale (ex. FEC, prix de transfert, CBCR, piste d’audit fiable en matière de TVA, RAS, IFU, DAS 2 …) ainsi que les délais de paiement des impositions dont elle est redevable. De même, l’entreprise ne doit pas avoir fait l’objet de pénalités pour manquement intentionnel au cours de cette période.
L’entreprise candidate fait ainsi l’objet d’une enquête préalable de moralité avant toute entrée dans le dispositif. La volonté de Bercy est en effet de le réserver aux entreprises faisant preuve de citoyenneté fiscale. Ces critères de moralité fiscale devront être respectés tout au long du partenariat.
Une fois la candidature retenue, un protocole d’accord est signé entre l’entreprise et le Service Partenaire qui désigne alors un interlocuteur unique. Ce dernier, n’appartenant pas au service de contrôle, sera par la suite le point de contact régulier et privilégié de l’entreprise pour la mise en œuvre du partenariat fiscal.
Chaque exercice fiscal, les entreprises et leurs interlocuteurs identifient d’un commun accord les questions présentant des risques ou des enjeux stratégiques nécessitant une prise de position formelle de l’administration fiscale. Il peut s’agir à titre d’exemple du traitement fiscal d’opérations récurrentes à fort enjeu financier (provisions, charges d’intérêts, traitement TVA), de la mise en œuvre de nouvelles réglementations (régime d’imposition des redevances, dit « nexus » ) ou d’opérations ponctuelles clés pour leur développement (restructurations, valorisation, cessions d’actifs ou de titres). Il ne s’agit pas d’une revue complète du résultat fiscal.
Les sujets pouvant faire l’objet d’une demande de rescrit sont ainsi très divers. En pratique, le Service Partenaire refuse toutefois de prendre position sur les sujets faisant déjà l’objet d’un contrôle fiscal en cours (même si la demande concerne des exercices différents) ou d’une saisine d’un autre service. L’objectif est avant tout de sécuriser en amont du dépôt des déclarations fiscales, le traitement fiscal des questions fiscales complexes sans pour autant empiéter sur les prérogatives des autres Services de la DGFIP.
Le Service Partenaire attache une attention particulière à délivrer son rescrit dans un délai de trois mois à compter de la réception d’une demande complète de rescrit formulée par l’entreprise. Ce délai de traitement court est extrêmement apprécié de la part des entreprises.
Le Service Partenaire fait, par ailleurs, preuve d’approche constructive dans la gestion de la demande de rescrit même si le niveau de documentation exigé reste élevé dans la mesure où le rescrit exclut tout contrôle portant sur la même problématique. En pratique, le Service Partenaire se livre à une analyse approfondie des points faisant l’objet d’une demande de rescrit mais le débat est nettement plus ouvert et serein que dans le cadre d’un contrôle fiscal classique et l’avantage majeur est qu’en cas de désaccord l’entreprise est informée en amont et peut régulariser sa situation ou renoncer à l’opération plutôt que d’encourir le risque de pénalités fiscales.
Une fois obtenu, le rescrit sécurise la position fiscale de l’entreprise sous réserve que les faits et la législation sur lesquels s’est prononcé le Service n’aient pas évolué.
Dans le contexte de la loi fraude du 23 octobre 2018 et du risque de pénalisation qui en découle, le partenariat fiscal permet aux entreprises de sécuriser leurs positions fiscales et éviter des contentieux longs et au dénouement parfois incertain. Même s’il est indéniable que l’exigence de transparence requise génère une charge de travail importante pour les entreprises, elle est à mettre en balance avec celle requise a posteriori dans le cadre d’une vérification de comptabilité.
Rappelons également que le partenariat permet aux entreprises de bénéficier d’un traitement favorable en cas d’erreur de bonne foi révélée dans le cadre du partenariat. Les redressements notifiés sont en effet exclusifs de pénalités et les intérêts de retard sont réduits de moitié.
En conclusion, le bilan est positif pour les entreprises sachant que pour convaincre les plus hésitantes, il peut être mis fin au partenariat à tout moment et que ce dernier est gratuit.