Premium

Entretien - Patrick Artus, chef économiste de Natixis

«Le monde n’est pas dans un processus de reprise cyclique»

Publié le 11 septembre 2015 à 15h00    Mis à jour le 11 septembre 2015 à 17h44

Propos recueillis par Valérie Nau

Malgré le ralentissement du commerce mondial, pénalisé par les difficultés de la Chine et des pays émergents, la croissance de la zone euro va être sauvée cette année par la baisse des prix du pétrole et de l’euro. Alors que cette conjonction d’éléments favorables ne devrait pas perdurer en 2016, les moteurs susceptibles d’alimenter une croissance européenne endogène restent très incertains.

La situation en Chine vous paraît-elle aussi inquiétante que le laisse supposer la réaction des marchés cet été ?

D’abord, il faut noter que la situation n’est pas seulement problématique en Chine, elle l’est globalement dans les pays émergents. Le Brésil, la Russie sont en récession, la croissance de la Turquie a fortement ralenti… En outre, tous les exportateurs de matières premières sont en difficulté, au Moyen-Orient, en Afrique, mais aussi la Russie, le Canada, l’Australie… L’environnement mondial est donc très dégradé.

Les marchés ont néanmoins réagi plus violemment à la Chine, car le pays souffre effectivement de la forte hausse de ses coûts de production. Le coût unitaire des salaires n’a pas cessé d’augmenter depuis 15 ans : corrigé de la productivité, il augmente en moyenne de 7 % par an. Or les salaires ont monté sans que le niveau de gamme de l’économie puisse valider une telle hausse : l’essentiel des produits chinois porte sur du textile, de l’électroménager, du ciment, de l’acier, du cuivre pour la construction, des infrastructures publiques, etc. Par conséquent, la compétitivité de la Chine s’est détériorée. Elle a perdu beaucoup de parts de marchés à l’exportation, ce qui a entraîné une situation de surcapacité considérable, tandis que les prix industriels ont baissé de 6 % en un an.

La Chine se trouve donc dans une situation déflationniste. L’effondrement de la rentabilité du capital a provoqué une chute de l’investissement, et d’énormes exportations de capitaux. En termes nets, environ 80 milliards de capitaux sortent chaque mois de Chine depuis l’été 2014, essentiellement des capitaux d’entreprises qui auraient dû s’investir localement et qui vont s’investir ailleurs.

L'info financière en continu

Voir plus

Les dernières lettres professionnelles

Voir plus

Dans la même rubrique

Abonnés Electricité : l’impossible réforme du marché

Si les prix de marché de l’électricité sont actuellement modérés, cette situation favorable pourrait...

Premium BCE : un coup d’arrêt prochain à la baisse des taux d’intérêt ?

Dans un contexte économique plus que jamais incertain, la Banque centrale européenne hésite sur la...

Premium Un futur impôt sur les riches très différent de la « taxe Zucman »

Votée récemment par l’Assemblée nationale, la « taxe Zucman », qui a toutefois de très faibles...

Voir plus

Chargement en cours...

Chargement…