S’il est un secteur qui, très tôt, a cherché à s’atteler au défi de la transition énergétique, c’est bien celui de l’immobilier. Malgré les avancées réalisées dans ce domaine au cours des dernières années, les besoins demeurent substantiels, exacerbés d’une part par l’urgence climatique qui implique de rendre les logements et les bâtiments moins énergivores, et d’autre part par le caractère toujours plus contraignant de la réglementation, qui pousse les professionnels et les propriétaires à accélérer dans cette voie.
L’atteinte de cet objectif d’immobilier durable passera certes par d’importants efforts en matière de construction, mais cela ne suffira pas, loin s’en faut. « L’immobilier, c’est un parc qui se renouvelle lentement, fait remarquer Bruno Blavier, directeur ESG – immobilier chez Swiss Life AM. Ainsi, 85 % des immeubles de 2050 existent déjà. » De ce fait, la clé principale réside dans la rénovation du parc existant.
Green premium
Une démarche dans laquelle certains investisseurs se sont engouffrés. « Nous achetons des actifs obsolètes, puis nous les rénovons entièrement avant de les revendre, informe April Tissier, sustainability senior manager chez Ardian. Durant cette phase de rénovation, nous nous focalisons bien sûr sur l’amélioration des performances énergétiques, c’est-à-dire tout ce qui est lié à l’usage du bâtiment – on parle de “carbone opérationnel”. Mais nous considérons qu’il faut aussi se focaliser sur le “carbone intrinsèque”, c’est-à-dire tout le carbone qui est lié aux travaux de restructuration de l’immeuble. C’est à ce titre que nous avons mis en place une méthodologie appelée “retour sur carbone investi”. » Pour les gérants spécialisés sur cette classe d’actifs réels, la priorité en matière de rénovation consiste à conférer au bien concerné une prime verte. « Concrètement, on parle de green premium lorsqu’on est capable de mettre en place une caractéristique ESG, par exemple en termes de très bonne performance énergétique qui à la fois correspond aux attentes des utilisateurs et n’est pas encore massivement adoptée, détaille Bruno Blavier. A l’inverse, on a une décote lorsque la caractéristique est déjà massivement déployée ou que notre actif n’en a pas. »
L’obtention de cette prime nécessite cependant des prérequis, autres que la localisation du bien et les matériaux utilisés. « Pour aller chercher du premium, il faut aussi identifier les meilleures technologies (géothermie profonde, capteurs de taux d’occupation, etc.), et les tester avant de les déployer massivement. Cela peut aussi impliquer d’avoir un dialogue plus étroit avec les locataires. »
Pour beaucoup, cette dimension humaine apparaît en effet fondamentale. « C’est surtout le cas pour des bureaux, poursuit April Tissier. La crise de la Covid-19 est venue renforcer le besoin des collaborateurs d’avoir un lieu pour se retrouver, pour collaborer, pour échanger. Dès lors, nous avons vraiment un rôle à jouer pour créer, plus qu’auparavant, du lien. »