A l’instar du private equity, les marchés de la dette privée et des actifs réels sont gagnés par la déferlante ESG depuis plusieurs années. D’après les investisseurs concernés, cette tendance serait vertueuse à plusieurs titres.
« En amont de la décision d’investissement, l’analyse extra-financière permet d’éviter certains risques que l’on ne peut pas identifier à travers des chiffres uniquement, estime Sandrine Richard, head of private debt chez Generali Investments Partners. En outre, l’approche ESG implique de mettre en place un dialogue poussé avec les PME, qui nous permet notamment de mieux comprendre leurs besoins d’accompagnement. »
La démocratisation des « ESG margin ratchets »
Côté gérants, cette démarche va aujourd’hui bien au-delà de la seule prise en compte de la stratégie RSE des émetteurs, comme en témoigne la généralisation des « ESG margin ratchets » dans les financements octroyés. Cette pratique repose sur l’intégration de critères ESG qui, indexés à la marge de l’entreprise, entraînent une bonification du coupon en cas de respect des objectifs et/ou un malus en cas de non-atteinte. « Nous recherchons autant que possible à avoir un équilibre dans ce mécanisme d’ajustement à la hausse ou à la baisse de marge, qui sert à aligner les intérêts entre l’actionnaire, la société et les prêteurs », prévient Sandrine Richard. La majoration du coût d’emprunt n’est d’ailleurs pas le seul levier utilisé par les investisseurs pour renforcer l’incitation de l’émetteur à honorer ses engagements. « Nous aimons regarder les covenants financiers, mais aussi les covenants qualitatifs, signale Shirley Chojnacki, investment director – deputy energy officer chez Edmond de Rothschild. Dans le cadre du financement d’une usine de recyclage en Espagne, nous avions par exemple fixé un objectif de 40 % minimum de recyclage par an. Si ce pourcentage n’est pas atteint, les actionnaires ne peuvent alors pas se verser de dividendes. »
Une quête de matérialité
A en croire les opérateurs de marché, ces structurations dites sustainability-linked devraient continuer d’essaimer dans les opérations de dette privée et celles portant sur des actifs réels, qui sont promises à un bel avenir. « Quand on parle de décarbonation de l’économie, de l’industrie, du transport, des services publics, etc., cela représente 700 milliards d’euros de besoins d’investissements par an en Europe pour atteindre les objectifs européens fixés à horizon 2030 », rappelle Shirley Chojnacki.