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Finance numérique - L’Europe avance

Publié le 3 décembre 2021 à 17h35

Thomas Feat    Temps de lecture 17 minutes

Depuis plus d’un an, la Commission européenne travaille au déploiement d’une stratégie pour la finance numérique, intitulée Digital Finance Package. Cette feuille de route est axée d’une part sur l’accompagnement et l’encadrement de l’innovation, d’autre part sur l’amélioration du marché communautaire des paiements de détail. Ses dispositions, dont plusieurs pourraient entrer en vigueur d’ici douze à dix-huit mois, concerneront aussi bien les institutions financières que les entreprises.

Connaissez-vous MiCA et DORA ? Il ne s’agit pas, malgré leurs sonorités amusantes, de prénoms portés par des personnages de films d’animation, mais bien de deux propositions de règlements communautaires particulièrement importantes pour le secteur financier validées, fin novembre, par le Conseil européen. Celles-ci s’inscrivent dans un projet d’ampleur initié par la Commission européenne d’Ursula von der Leyen en septembre 2020 : le déploiement, à l’échelle des 27, d’un grand plan de transformation de la finance numérique d’ici 2024. « Cette feuille de route, intitulée Digital Finance Package, ou DFT, concerne les institutions financières telles que les banques, les sociétés de gestion et les opérateurs de marché, mais aussi les entreprises et les consommateurs », indique Jérôme Sutour, associé chez CMS Francis Lefebvre. Aboutissement de dizaines de rapports et de consultations – dont le plan d’action pour les fintechs de 2018 et l’étude du Parlement européen sur la finance numérique de 2020 –, le Digital Finance Package se distingue par son ampleur. « Il s’agit d’une stratégie très ambitieuse, estime Jérôme Sutour. Les thématiques abordées s’étendent des paiements à l’accessibilité et l’échange des données, en passant par la sécurité informatique des institutions financières, la prévention du financement des activités illicites et le développement de la Blockchain et des cryptoactifs. »

 Vers un encadrement communautaire de la Blockchain et des cryptoactifs avec MiCA

  • Ces dernières années, les applications potentielles de la Blockchain en matière financière n’ont cessé de se diversifier. Plusieurs expérimentations ont montré, par exemple, que la technologie permet de transférer plus rapidement et plus efficacement des titres financiers que les systèmes de règlement traditionnels. Dans le même temps, la gamme des cryptoactifs – autrefois circonscrite aux cryptomonnaies, comme le bitcoin – s’est considérablement étoffée. Une conséquence de la création des « stablecoins », actifs numériques indexés à des sous-jacents, comme les devises conventionnelles, et utilisés plus spécifiquement pour réaliser des paiements, et de celle des « utility tokens » ou jetons utilitaires, actifs numériques dont la principale fonction est de permettre l’accès aux produits ou services de leurs émetteurs. Dans ce contexte, la Commission européenne a présenté, en septembre 2020, deux propositions de règlements centrés respectivement sur la Blockchain et les cryptoactifs. Ces textes vont introduire des changements notables pour les acteurs de la cryptosphère, les institutions financières et, potentiellement, les entreprises.
  • Le premier texte prévoit l’instauration d’un régime d’exemptions réglementaires destinées aux entreprises d’investissement agréées au sens de la directive MIF, et aux dépositaires centraux de titres tels que définis par le règlement CSDR de 2014. Les intermédiaires qui en feront la demande pourront, après avoir fourni aux régulateurs diverses informations sur les caractéristiques de la technologie retenue, recourir à la Blockchain pour transférer des valeurs mobilières matérialisées sous la forme de « security tokens ». « Le compte-titre traditionnel n’est plus reconnu comme seul support viable de ces opérations, indique Franck Guiader, directeur de Gide 255 - Innovation & Fintech. Il s’agit d’une évolution majeure qui va permettre l’émergence d’un marché secondaire des titres financiers -  comme les actions ou les obligations -, inscrits sur la Blockchain. » Tel qu’esquissé par la Commission, le dispositif devrait être institué pour une durée de six ans.
  • Le second texte, baptisé Market in Crypto Assets (MiCA), instituera pour sa part une nomenclature européenne des cryptoactifs. « Celle-ci distinguera d’abord les cryptoactifs associés à des monnaies électroniques et relevant donc de la réglementation afférente, relève Jérôme Sutour, partner chez CMS Francis Lefebvre. Elle qualifiera ensuite les cryptoactifs tels que les stablecoins – désignés juridiquement par l’appellation « asset referenced tokens » ou jetons indexés à d’autres actifs – et les « utility tokens ». Le règlement rendra également obligatoire l’obtention d’un agrément communautaire à tous les prestataires européens de services sur cryptoactifs. Cet agrément sera valable dans tout l’espace communautaire. « Les prestations couvertes par le dispositif auront trait à l’émission, à l’échange, au trading et à la conversion d’actifs numériques tels que les stablecoins, mais pas les security tokens dont la nature juridique diffère, précise Franck Guiader. En effet, ces derniers représentent des instruments financiers, et sont donc régulés par la réglementation qui encadre ce type de produits, à l’instar de la directive MIF 2. » Les émetteurs de cryptoactifs (hors security tokens) seront tenus, quant à eux, de rédiger des prospectus (ou livres blancs) et de fournir des garanties en amont de leurs opérations.

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