La question du «juste prix» d’un bien immobilier se pose de façon récurrente lorsque l’on souhaite le céder, le déclarer ou le déprécier. Cette quête est d’autant plus délicate que les différentes méthodes qui existent pour apprécier la valeur vénale fournissent des résultats disparates.
Par Christophe Frionnet, avocat associé spécialisé en fiscalité et Stéphanie Némarq, avocat spécialisé en fiscalité.
Reste à savoir quelle valeur sera opposable à l’administration fiscale en cas de contrôle. La doctrine préconise la méthode du comparable, à l’aide de ventes de biens analogues dans un même périmètre géographique. Encore faut-il, d’une part, que les contribuables puissent accéder à une information fiable et précise et d’autre part, que les caractéristiques du bien et sa localisation le rendent comparable, surtout lorsque les transactions se font rares et que le marché subit en permanence des variations. Dans ce contexte, la DGFiP a mis récemment en ligne un service destiné à aider les contribuables à estimer la valeur de leurs biens d’habitation. Introduit par la loi de finances rectificative pour 2011, le service Patrim «Rechercher des transactions immobilières» est accessible depuis janvier 2014 par tous les contribuables via leur compte fiscal sur le site impots.gouv.fr. Comment accueillir ce nouvel outil ?
Tout d’abord, Patrim n’est pas destiné à faciliter la vente de son appartement ou à prospecter pour une acquisition future. Codifié à l’article L. 107 B du Livre des procédures fiscales, son usage est en principe strictement réservé à la sphère fiscale. Il s’agit de donner accès à des données foncières similaires pour accomplir ses obligations déclaratives en matière d’ISF, de succession, de donation, mais également en cas de contrôle fiscal ou d’expropriation. L’objectif annoncé est d’équilibrer le niveau d’information entre un particulier et l’Administration. Cette transparence est à double tranchant. Tout d’abord, l’usager s’identifie via son espace personnel. Sa visite (identifiant, adresse IP, date, heure et motif de la visite) sera ainsi mémorisée pendant un an. Ensuite, il saisit ses critères de recherche : le type de bien (appartement, maison), sa superficie, sa localisation, le périmètre et la période de recherche et pour affiner, l’année de construction, le nombre de pièces, l’étage, la présence d’un ascenseur, de dépendances (garage, parking, cave, grenier, piscine, terrasse), la situation locative, la superficie du terrain, etc.
Les transactions de biens similaires, sans doute peu nombreuses, et leurs caractéristiques – recensées par les services de la publicité foncière et la documentation cadastrale – sont présentées sous forme d’un tableau et visualisables sur une carte.
Pour anticiper les dérives et les critiques du système, la DGFiP a précisé deux points :
– en cas de dialogue avec le service des impôts, cet outil ne constitue qu’un repère qui reste à affiner en fonction de spécificités telles que le bruit, l’orientation, le vis-à-vis, la disposition des pièces, les servitudes, les travaux, etc. Par conséquent, l’usage de Patrim ne saurait faire obstacle au droit de l’Administration de rectifier l’estimation d’un bien déclaré dans le cadre d’une procédure contradictoire. Logiquement et à l’inverse, on devrait s’estimer à l’abri de voir des vérificateurs opposer, sur le terrain de l’intention délibérée, l’existence de cet accès simplifié à l’égard d’un contribuable ayant évalué un bien sans prise en compte de la valeur théoriquement retenue par Patrim.
– sur le terrain de la sécurité des données personnelles et selon la CNIL, l’Administration ne peut – en principe – ni consulter, ni utiliser les données mémorisées par le système dans le cadre d’une procédure de contrôle fiscal ou en vue d’un contrôle (décret n° 2013-718 du 2 août 2013 adopté après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés).