La réévaluation des actifs immobiliers d’une société civile immobilière détenue par des personnes physiques est en principe sans conséquence sur le revenu foncier. En effet, celui-ci est constitué du seul montant des recettes brutes perçues augmenté des dépenses incombant normalement au propriétaire et mises par convention à la charge du locataire.
Par Richard Foissac, avocat associé, spécialisé en fiscalité.
Cette réévaluation est également sans conséquence sur les plus-values, dès lors qu’elle ne s’analyse pas en une cession à titre onéreux du droit de propriété afférent aux actifs immobiliers précités.La solution est différente lorsque le capital social d’une société de personnes est détenu par des personnes morales soumises à l’IS puisque dans ce cas, la combinaison des règles de l’IS et de l’article 238 Bis K I du Code général des impôts (CGI), fait que le profit de réévaluation est compris dans le bénéfice imposable de la société civile pour une part revenant aux associés précités. Le Conseil d’Etat dans une récente décision du 12 juillet 2013 (n° 338278, 8e et 3e s.-s., Sté Cofathim) vient de modifier cette situation dans le cadre d’une affaire que l’on peut espérer «particulière» mais qui pose néanmoins un principe d’imposition qu’il convient de prendre en compte désormais. Le cas était le suivant : une SCI relevant de l’article 8 du CGI au capital social partiellement libéré, et détenu par des personnes physiques, avait procédé à une réévaluation libre d’immeubles qu’elle détenait et avait crédité le compte de passif «écart de réévaluation libre» par le débit du compte d’actif «constructions».
Les associés personnes physiques avaient ultérieurement prélevé une somme sur le compte d’écart de réévaluation pour créditer leurs comptes courants d’associés. Ils avaient ensuite libéré la fraction non libérée du capital social par compensation avec leurs comptes courants d’associés, enfin au titre de la même année, avaient cédé leurs parts sociales à une société soumise à l’IS. L’administration fiscale avait réintégré dans les bénéfices de la SCI la fraction de l’écart de réévaluation qui avait été repartie aux comptes courants des associés personnes physiques au motif qu’elle ne correspondrait à aucun flux économique et ne pouvait représenter la contrepartie d’apports effectifs des associés. Cependant, elle avait soumis à l’IS les sommes en question au niveau de l’associé personne morale dès lors qu’il détenait les titres à la clôture de l’année des opérations. Le Conseil d’Etat a confirmé le principe selon lequel la plus-value dégagée par une société relevant de l’article 8 du CGI (détenue par des personnes physiques), à l’occasion de réévaluation d’immeubles ne constitue pas un élément du résultat tant que l’immobilisation réévaluée n’a pas été cédée.
En revanche, il a considéré que le transfert des sommes inscrites au compte d’écart de réévaluation sur des comptes courants d’associés, alors même que les immobilisations correspondantes n’avaient pas été cédées, revêtait le caractère d’une répartition entre les associés des sommes concernées au demeurant considérée comme prohibée par les dispositions de l’article L. 232-11 du code de commerce. Ce transfert avait pour effet de faire perdre son caractère latent à la plus-value correspondant à l’écart de réévaluation et rendre celle-ci immédiatement imposable entre les mains des associés présents à cette date, à savoir les associés personnes physiques et non l’associé personne morale présent à la clôture de l’exercice.Cette solution pose difficulté car jusqu’à présent, il était considéré que la répartition des écarts de réévaluation, au sein de SCI non soumises à l’IS détenues par des personnes physiques, ne contrevenait pas aux dispositions de l’article L. 232-11 du code de commerce et ne constituait pas un fait générateur d’imposition des plus-values. Il faut espérer que la complexité des opérations réalisées, combinant réévaluation, affectation de l’écart de réévaluation et cession de titres a pu justifier la solution retenue. Affaire à suivre…