La taxe de 3 % sur les immeubles n’a pas vocation à être payée mais plutôt à obliger les contribuables qui détiennent des immeubles français au travers de sociétés interposées, à dévoiler leur identité ainsi que la situation et la valeur vénale desdits immeubles.
Par Julien Saïac, avocat associé en fiscalité. Il traite plus particulièrement des questions relatives aux restructurations internationales et aux investissements immobiliers.
julien.saiac@cms-fl.com et Mary Lédée, avocat en fiscalité. Elle intervient en matière de fiscalité transactionnelle et conseille les entreprises au quotidien, principalement dans le secteur immobilier (structuration des acquisitions, accompagnement dans le cadre des négociations et en matière de rédaction des clauses fiscales des actes, réalisation d’audits). mary.ledee@cms-fl.com
Dans cette optique, sont notamment exonérées les entités qui s’engagent à révéler ces informations soit sur demande de l’administration, en cas d’engagement en ce sens pris lors de l’acquisition de l’actif, soit au plus tard le 15 mai de chaque année, au moyen d’un formulaire spécifique (n°2746).
A compter de 2021, ce formulaire, jusqu’à présent envoyé sous format papier, devra obligatoirement être télédéclaré sur le site de l’administration fiscale.
Télédéclaration, quelles conséquences ?
Ce changement devrait être relativement indolore pour les entités françaises et étrangères déjà identifiées auprès des services fiscaux français. Mais il pourrait susciter des complications pour les entités étrangères n’ayant à ce jour jamais déposé de déclaration fiscale en France. En effet, le dépôt sous format électronique de leurs déclarations supposera qu’elles fassent au préalable une demande d’attribution d’un numéro SIREN, qui, une fois attribué, leur permettra de créer leur espace professionnel en ligne et ainsi satisfaire à leurs obligations déclaratives.Or, en pratique, il peut arriver que les sociétés étrangères, dont la présence en France se limite à une détention très indirecte d’actifs immobiliers, ne déposent pas la déclaration qui leur assure pourtant l’exonération. Cet oubli est généralement sans conséquence dès lors que, par tolérance administrative, la taxe de 3 % n’est pas due si le contribuable de bonne foi envoie les informations demandées dans les 30 jours suivant la réception d’une première mise en demeure de régulariser sa situation. Cette régularisation n’est toutefois possible que si l’entité n’a jamais bénéficié de cette tolérance auparavant. Elle se fait en pratique par l’envoi des formulaires n°2746 au titre des années concernées. Le défaut d’envoi dans les délais est susceptible d’entrainer la taxation d’office.
Veiller à bien respecter les délais de dépôt des formulaires
La dématérialisation des déclarations s’étendra-t-elle à celles déposées à la suite d’une mise en demeure ? La Direction générale des finances publiques a indiqué oralement que le format papier resterait, dans un premier temps, privilégié pour les procédures de régularisation. A terme, on peut craindre des difficultés pratiques pour les entités étrangères qui ne disposent souvent ni de comptable ni de conseil habituel en France pour les aider à régulariser leur situation.
L’administration fiscale fera-t-elle preuve de bienveillance en cas de retard dû à des difficultés rencontrées dans le cadre du dépôt annuel sous format électronique, voire à la suite d’une régularisation ? Il a été indiqué que cela serait le cas mais uniquement à ce stade pour la campagne déclarative de 2021 et sous réserve de prévenir l’Administration en amont des problèmes rencontrés.
En tout état de cause, alors que le formalisme se dématérialise et suppose des démarches préalables auprès de l’administration fiscale française, il demeure essentiel de déposer les formulaires dans les délais.
En effet, la Cour de cassation a confirmé tout récemment (Cour de cassation, 4 novembre 2020, n°18-11.771) que le dépôt tardif de la déclaration était sanctionné par l’exigibilité de la taxe elle-même, et non pas seulement par des pénalités de retard, sauf à pouvoir bénéficier de la tolérance précitée. En pratique, cela signifie que les contribuables qui en auraient déjà bénéficié par le passé pourraient être redevables de la taxe de 3 % s’ils ne parvenaient pas à télédéclarer le formulaire à temps.
Afin d’éviter tout risque en cas de difficultés dans le cadre de la nouvelle procédure dématérialisée, l’envoi d’une déclaration papier dans les délais devrait être privilégié, le non-respect du format dématérialisé n’étant sanctionné que d’une amende de 15 euros par déclaration (sans que le total des amendes applicables puisse être inférieur à 60 euros ni supérieur à 150 euros).