La stratégie financière des grands groupes hôteliers, confrontés à l’envolée du marché immobilier et à la crise, a conduit ces derniers à céder les murs de leurs hôtels pour n’en conserver que la gestion selon une politique dite d’asset light en recourant au contrat de gestion hôtelière.
Par Cécile Sommelet, avocat counsel en corporate/fusions & acquisitions. Elle intervient particulièrement dans les opérations de restructuration et de fusion-acquisition du secteur de l’immobilier. cecile.sommelet@cms-bfl.com
A mi-chemin entre le contrat de mandat et le contrat d’entreprise, le contrat de gestion hôtelière consiste, pour le propriétaire d’un hôtel, à en confier la gestion à un opérateur hôtelier dont c’est le cœur de métier. Ce dernier, généralement une chaîne hôtelière, va exploiter l’hôtel en utilisant sa marque et son savoir-faire ainsi que sa centrale de réservation et ses programmes de fidélité, de ventes et de marketing.
Dans un tel schéma, le propriétaire bénéficie des profits dégagés par l’exploitation de l’hôtel. Une bonne gestion de l’hôtel lui permettra ainsi de prétendre à un revenu supérieur à celui qui aurait été le sien dans l’hypothèse où il aurait conclu un simple contrat de bail.
Quant à l’opérateur hôtelier, tout en gérant la structure de façon relativement autonome, il laisse à la charge du propriétaire les risques d’exploitation de l’hôtel pendant toute la durée du contrat, souvent longue.
La pratique du contrat de gestion n’est donc pas sans risque pour le propriétaire qui doit être particulièrement vigilant lors des négociations avec des opérateurs hôteliers très souvent rompus à ce type de schéma. Les obligations du gestionnaire et la façon dont celui-ci devra en rendre compte au propriétaire devront être précisément définies. Certaines décisions importantes, notamment celles relatives au budget et au choix du personnel clé, pourront ainsi être soumises à l’accord préalable du propriétaire.
Mais c’est surtout la mise en place de tests de performance qui permettra d’évaluer la gestion de l’opérateur par rapport à des comparables de marché. En cas de non-respect de critères de performance fondés sur la réalisation d’un certain niveau d’EBE ou d’un niveau de revenu par chambre disponible (RevPar), le propriétaire pourra généralement, soit résilier le contrat, soit demander au gestionnaire de compenser le manque à gagner.
Le gestionnaire quant à lui n’est pas totalement affranchi de tout risque, particulièrement lorsque le contrat met à sa charge des risques d’exploitation, notamment ceux relatifs à la gestion du personnel. La pratique du contrat de gestion a ainsi donné lieu à un contentieux relatif à la requalification du gestionnaire en employeur de fait.
Les modalités de rémunération du gestionnaire constituent un autre enjeu important de la négociation du contrat de gestion. Le gestionnaire perçoit en général une redevance de base, fondée sur un pourcentage du chiffre d’affaires et une redevance incitative, proportionnelle au résultat de l’hôtel. Inciter le gestionnaire à être performant pourra consister pour le propriétaire à prévoir de différer le paiement de la part variable de la rémunération au dépassement d’objectifs financiers préalablement définis.
Le gestionnaire touche en outre des redevances au titre de l’utilisation de sa marque ainsi que de son programme marketing et de son système de réservation.
Une attention toute particulière devra enfin être apportée aux clauses de non-concurrence visant à limiter l’activité du gestionnaire à un certain périmètre géographique, aux conséquences d’une éventuelle cession de l’hôtel ainsi qu’aux modalités de résiliation du contrat, les contrats de gestion hôtelière étant fréquemment conclus pour une durée supérieure à quinze ans.
Pas si certain finalement que le contrat de gestion hôtelière puisse se résumer en «à chacun son métier, à chacun ses risques».