L’extension aux services de gestion de nombreux fonds d’investissement immobilier de l’exonération de TVA crée des opportunités, mais génère aussi de réelles difficultés pour les sociétés de gestion qui voient réduire leurs droits à déduction de TVA et augmenter leur assujettissement à la taxe sur les salaires. Cette situation conduit à envisager l’exercice d’une option pour la taxation volontaire de ces opérations à la TVA mais uniquement après une étude approfondie, car cette option emporte à ce jour la taxation de toutes les opérations financières à l’exception de celles qui sont légalement exclues.
Par Gaëtan Berger-Picq, avocat associé en fiscalité.
Il conseille et assiste les entreprises, notamment en immobilier, dans l’ensemble des sujets relatifs à la TVA et à la taxe sur les salaires ainsi que dans le suivi et la gestion
des contrôles et contentieux fiscaux.
La gestion de certains « Autres fonds d’investissement alternatifs » est désormais exonérée de TVA
Le champ d’application de l’exonération de TVA des services de gestion de fonds a été élargi depuis 2020 et couvre désormais la gestion de tout fonds présentant des caractéristiques similaires aux OPCVM, dont l’article 71 de l’annexe III au CGI dresse une liste non exhaustive. Y figurent notamment les OPCI (SPPICAV, FPI) et les sociétés civiles de placement immobilier (SCPI).
S’y ajoutent, selon les commentaires de l’administration fiscale et même s’ils ne sont pas expressément visés par les textes, les « Autres FIA » de l’article L. 214-24 III du Code monétaire et financier lorsqu’ils effectuent des opérations qui les placent en situation de concurrence avec les OPCVM, c’est-à-dire lorsque les quatre conditions suivantes sont réunies :
– être un placement collectif ;
– fonctionner selon le principe de répartition des risques ;
– être soumis à une surveillance étatique spécifique, condition au titre de laquelle l’administration fiscale précise qu’elle s’apprécie au niveau du placement collectif et non de la société de gestion et qu’elle est réputée remplie dès lors que le placement collectif est enregistré, déclaré ou notifié auprès des autorités compétentes.
– avoir un retour sur investissement subordonné à la performance des investissements, ce qui implique que les détenteurs d’actifs doivent assumer les risques inhérents à la gestion des actifs.
Les opportunités et les inconvénients générés par cette exonération
Lorsque l’organisme géré n’est pas intégralement récupérateur de la TVA, l’exonération des prestations de gestion qui lui sont facturés est évidemment intéressante.
Il ne faut toutefois pas oublier qu’elle a pour corollaire une perte de droits à déduction pour la société de gestion qui ne peut pas récupérer la TVA grevant ses dépenses engagées pour réaliser cette activité ; elle doit éventuellement procéder à des reversements de fractions de TVA antérieurement déduite sur les acquisitions et créations d’immobilisations en cas de variation sensible du prorata de déduction sur une période de 5 ans pour les meubles et 20 ans pour les immeubles.
En outre, l’exonération de TVA entraine un alourdissement de la charge de taxe sur les salaires de la société de gestion dès lors que la part de son chiffre d’affaires annuel n’ouvrant pas droit à déduction de TVA excède 10 % (en dessous, la taxe sur les salaires n’est pas applicable).
Finalement, l’exonération de TVA crée une nette modification de l’équilibre économique entre la société de gestion et le fonds et nécessitera vraisemblablement une renégociation de la tarification lorsque celle-ci a été établie initialement sur base de taxation.
La réflexion sur une éventuelle taxation sur option
Alternativement, la société de gestion peut faire le choix de taxer volontairement ses prestations à la TVA en exerçant l’option prévue par l’article 260 B du CGI. Cette voie devra toutefois faire l’objet d’une étude préalable complète car l’option couvre en principe l’ensemble des opérations financières exonérées de TVA par l’un des alinéas de l’article 261 C, 1 du CGI, sauf celles qui sont spécifiquement exclues par l’article 260 C du même code. Autrement dit, il n’est actuellement pas possible de choisir de taxer uniquement les prestations de gestion.