En matière de constructions immobilières la problématique n’est pas seulement de respecter des engagements contractuels pris à l’égard des acquéreurs, mais aussi d’éviter la remise en cause d’un éventuel avantage fiscal, pour le promoteur comme pour l’investisseur. L’Administration vient d’apporter une souplesse, toutefois pas encore transposable de plein droit à tous les dispositifs.
Il conseille notamment les entreprises dans l’ensemble de leurs opérations. Il est chargé d’enseignement en matière de fiscalité immobilière à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne. christophe.frionnet@cms-fl.com
Les crises successives (mouvements sociaux, Covid-19, pénuries), combinées au renforcement de contraintes règlementaires du secteur, n’ont pour autant pas conduit le législateur à revoir les exigences légales de délais s’agissant de nombreux dispositifs fiscaux.
Les interruptions et retards de chantier présentent souvent un enjeu fiscal non négligeable chaque fois que l’une ou l’autre des parties concernées (vendeur du terrain, acquéreur promoteur ou marchands de biens, investisseur particulier) a pu bénéficier d’un allègement fiscal (droits de mutation, taux réduit d’IS, crédit d’impôt Pinel ou Censi-Bouvard, etc.).
En fonction des dispositifs, les opérateurs peuvent être contraints de solliciter des rescrits au cas par cas, en justifiant de contraintes externes et en s’exposant à un aléa quant aux chances de succès de leur demande selon les critères retenus par les services fiscaux compétents.
S’appuyant sur les dispositions de l’Ordonnance du 25 mars 2020 destinée à proroger certains délais pendant la période d’urgence sanitaire, la doctrine administrative (BOI-DJC-COVID19-10-20200624 n°80 et suiv.) avait prévu, en matière fiscale, une suspension de certains délais imposés aux contribuables pour se conformer à des prescriptions de toute nature. Ont été visés les délais qui n’avaient pas expiré avant le 12 mars 2020. Ils étaient, à cette date, suspendus jusqu’à la fin de la période « juridiquement neutralisée » c’est-à-dire jusqu’au 23 juin 2020.
Les contribuables concernés étaient donc déjà en mesure de bénéficier d’une prorogation de leur délai à hauteur de 104 jours calendaires et ce pour ce qui concerne de la plupart des dispositifs fiscaux applicables.
Eu égard à la persistance des pénuries d’approvisionnement et compte tenu des nombreux impacts collatéraux qui vont au-delà de cette seule période, on pouvait espérer qu’une prorogation de cette mesure soit adoptée, et ce indépendamment des reports pouvant être individuellement accordés par exemple par voie de rescrit. A ce stade le législateur n’est toujours pas intervenu mais l’administration fiscale vient de faire un pas.
C’est ainsi qu’une prorogation de 261 jours du délai d’achèvement, en sus du délai de 104 jours, a été accordée par la doctrine administrative en date du 2 mars 2022 (IR - DJC - Dispositif « Pinel »). Mais cette mesure ne concerne que le seul délai « Pinel » de trente mois prévu au C du I de l’article 199 novovicies du Code général des impôts.
En conséquence, ce délai légal qui n’avait pas expiré avant le 12 mars 2020 pour un investissement éligible au crédit d’impôt Pinel est prorogé d’une période totale de 365 jours.
Les contribuables qui ont signé leur acte de VEFA préalablement à cette date bénéficient donc d’une prorogation du délai d’achèvement « Pinel » d’une année.
Les contribuables ayant signé leur acte de VEFA postérieurement au 12 mars 2020, mais préalablement au 12 mars 2021, bénéficient d’une prorogation égale à la durée entre la date de signature de l’acte et le 12 mars 2021.
Bien entendu, s’il s’avérait que dans certaines situations complexes, le complément ainsi accordé n’était pas suffisant, cette tolérance n’exclut pas la possibilité de solliciter un délai complémentaire par voie de rescrit.
En tout état de cause il serait opportun que cette mesure, pour l’heure limitée au dispositif Pinel, soit étendue à l’ensemble des dispositifs fiscaux soumis à des contraintes d’achèvement.