Par Bruno Dondero, avocat associé
Une citation attribuée à Walt Disney énonce qu’un homme devrait ne jamais négliger sa famille pour les affaires. Mais le créateur de Mickey Mouse avait-il envisagé que la famille et les affaires sont fréquemment entremêlées, et qu’une société est bien souvent détenue par les membres, ou par certains des membres, d’une même famille, qui travaillent ensemble à l’exploitation économique commune, qui peut alors se transmettre de génération en génération ? Une autre rencontre de la société et de la famille se constate avec la SCI très largement utilisée comme structure de détention du bien immobilier dans lequel sont logés tout ou partie des membres de la cellule familiale.
En dépit de la fréquence des situations dans lesquelles société et famille se superposent, la société familiale n’est pas dotée d’un régime global spécifique. En parcourant le Code civil ou le Code de commerce, on ne trouvera donc pas, par exemple, une forme sociale spéciale que pourraient seuls utiliser les associés ayant un lien familial ou une relation de couple entre eux. Ce n’est que ponctuellement que sont pris en compte les liens familiaux entre les associés, par exemple lorsqu’il s’agit de faire entrer dans le cercle des associés ces « tiers » particuliers que sont le conjoint d’un associé ou bien l’héritier d’un associé décédé. Le législateur songe alors, dans certaines formes sociales, à instituer des règles spécifiques. Mais sur beaucoup de points, on cherche sans les trouver les règles régissant la société familiale.
Il serait cependant parfaitement faux d’affirmer que notre droit et notre fiscalité ignorent la société familiale. Le pacte Dutreil, par exemple, est véritablement pensé pour assurer la continuité de la société, et donc de l’entreprise, au-delà des transmissions d’une génération à une autre. Mais il demeure que pour beaucoup, la prise en compte du caractère familial d’une société suppose, si l’objectif est de préserver ce caractère, que soient accomplies des démarches particulières par les associés, qui devront adopter des clauses statutaires idoines ou mettre en place un pacte d’associés répondant à l’objectif précité.
Il est sans doute vain d’imaginer que l’on puisse appréhender toutes les sociétés familiales par des règles uniformes, mais il est assurément bienvenu que le législateur fournisse à ces entreprises les moyens de préserver leur identité… ou bien que les associés d’une même famille forgent eux-mêmes les instruments leur permettant d’arriver à cette fin.