La vente par un marchand de biens ou un promoteur d’un lot stocké doit-elle nécessairement s’effectuer pour un prix identique à celui d’un lot équivalent ? Le Conseil d’Etat admet qu’un écart de prix significatif entre deux lots identiques n’est pas de nature à caractériser à lui seul un acte anormal de gestion.
Par Christophe Frionnet, avocat associé en fiscalité. Il conseille notamment les entreprises dans l’ensemble de leurs opérations. Il est chargé d’enseignement en matière de fiscalité immobilière à l’Université Paris I Panthéon-Sorbonne. christophe.frionnet@cms-fl.com
On sait que la loi permet à l’administration fiscale de soumette à l’impôt toute minoration réalisée dans des conditions non conformes à l’intérêt de l’exploitation de l’entreprise. Pour autant, la jurisprudence réaffirme régulièrement que les services vérificateurs ne peuvent s’immiscer dans les décisions de gestion de l’entreprise.
Pour savoir de manière objective, en matière immobilière, si une opération est ou non réalisée dans des conditions financières insuffisantes et contraires à cet intérêt, la méthode comparative est généralement celle préconisée.
En cas de vente d’un actif immobilisé, le Conseil d’Etat venait d’ailleurs de juger1 qu’en cas de prix manifestement minoré par rapport à des transactions équivalentes récentes, le contribuable devait nécessairement apporter la preuve de l’existence d’une contrepartie. A défaut, l’administration fiscale a la possibilité de procéder à un rehaussement sur le terrain de l’acte anormal de gestion du seul fait de l’écart constaté.
En revanche, il est désormais jugé par cette même Haute juridiction que la situation d’une vente de stocks ne répond pas au même principe. Il est considéré que, dans cette hypothèse, c’est au service vérificateur d’apporter la preuve que l’acte n’est pas dans l’intérêt de l’entreprise2. Il en résulte que les entreprises peuvent, dans la mesure où cela s’inscrit dans la conduite normale de leurs opérations de cession de leurs stocks, vendre des lots pour des prix différenciés sans que les prix préalablement pratiqués pour des biens identiques puissent constituer des comparables qui leur seraient automatiquement opposables.
1. CE plén., 21 décembre 2018, «Croë Suisse».
2. CE, 27 février 2019, n° 401938, SCI Apollo.