Par Alexandra Rohmert, avocat associé en corporate/fusions & acquisitions. Elle accompagne les entreprises, essentiellement étrangères, dans leurs projets internationaux et plus particulièrement dans le cadre de fusions-acquisitions crossborder.
alexandra.rohmert@cms-fl.com
Et Véronique Bruneau Bayard, avocat en corporate/fusions & acquisitions. Elle intervient plus particulièrement sur les sujets de gouvernance, de gestion des risques, de RSE, d’éthique et de compliance.
veronique.bruneau-bayard@cms-fl.com
La Résolution du Parlement européen du 10 mars 2021 contenant des recommandations à la Commission sur le devoir de vigilance et la responsabilité des entreprises rappelle une étude de la Commission : seulement 37 % des entreprises ayant répondu à l’enquête exercent un devoir de vigilance en matière d’environnement et de droits de l’homme. Le Parlement Européen considère que les États membres doivent, à l’instar de la France, introduire des cadres obligatoires sur le devoir de vigilance et mettre en place ou désigner des autorités nationales chargées de partager les bonnes pratiques, mener des enquêtes, superviser et imposer des sanctions. C’est un dispositif contraignant, qui n’est pas sans rappeler à certains égards celui de la Loi Sapin II, qui pourrait voir le jour au sein de l’Union Européenne.
La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) montre l’intégration par les sociétés des préoccupations sociales et environnementales, dans leurs activités et dans leurs relations avec les parties prenantes, en adoptant des pratiques plus éthiques et plus durables. Cette gestion responsable se mesure grâce à trois critères extra-financiers : environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG). Aujourd’hui intégrée dans la stratégie de l’entreprise, la RSE est un vaste sujet et en fonction de son activité chaque société détermine la politique qu’elle juge la plus appropriée.
La RSE : entre la loi et la soft law
Sur certains sujets, comme le Code de gouvernance des sociétés cotées, la RSE s’appuie sur la soft law. Les sociétés se réfèrent au Code AFEP-MEDEF ou Middlenext et expliquent pourquoi elles n’appliquent pas certaines recommandations : principe du « comply or explain » (appliquer ou expliquer). Le législateur a cependant parfois choisi de rendre obligatoire des dispositions relevant auparavant de la soft law comme le vote sur la rémunération des dirigeants : le « say on pay ». Plus généralement, la RSE comporte d’ores et déjà plusieurs dispositions impératives pour les sociétés françaises. Ainsi, celles répondant à certains critères sur le montant de leur bilan et le nombre de salariés, doivent élaborer une déclaration de performance extra-financière (DPEF) comprenant des informations précises et détailles en matière sociale, environnementale et sociétale. En 2019, c’est la loi PACTE qui s’est imposée aux entreprises et les a conduites à repenser leur place dans la société en imposant aux dirigeants de prendre en compte les enjeux sociaux et environnementaux de l’activité sociale et en permettant aux sociétés d’inscrire leur « raison d’être » dans leurs statuts.
La prise en compte par les sociétés des enjeux sociaux et environnementaux
Ces dernières années, on a assisté à un développement de l’« investissement socialement responsable » (ISR) qui consiste à investir dans des entreprises intégrant dans leur modèle de développement, au-delà des notions financières, des critères sociaux et environnementaux. En réponse à une demande en matière de finance durable, Euronext créait en mars dernier, un nouvel indice : le CAC40 ESG, regroupant 40 sociétés parmi celles du SBF120 qui démontrent les meilleures pratiques en matière d’ESG.
Au cours des derniers mois, la Covid-19 a accentué la nécessité de prendre en compte les enjeux sociaux et environnementaux et a donné tout son sens au concept de RSE. Les assemblées 2021 ont d’ailleurs été marquées par l’importance consacrée aux enjeux environnementaux et climatiques. Pour la première fois, trois sociétés du CAC40 ont impliqué leurs actionnaires lors d’un vote consultatif, le say on climate, leur permettant de s’exprimer et engageant ainsi un véritable dialogue avec eux. Cette démarche initiée sous l’impulsion d’actionnaires activistes est aujourd’hui portée par plusieurs fonds et a rencontré un vif intérêt auprès des actionnaires individuels et du public. Avant même que les dispositifs législatifs soient déployés au niveau européen, la stratégie RSE s’inscrit comme un facteur à part entière de valorisation des entreprises.