Alors que le réseau social français Viadeo a vu son cours chuter de près de 95 % depuis son introduction en Bourse en juillet 2014, son nouveau PDG s’est alarmé des problèmes de trésorerie du groupe et vient de qualifier la valeur d’«investissement spéculatif». Vous êtes un spécialiste des valeurs technologiques. Qu’en pensez-vous?
L’échec de Viadeo met en lumière un problème profond qui dépasse le seul cadre de l’entreprise. Le secteur tech, en particulier le segment Internet, s’inscrit dans une logique de «winner takes all» : c’est en effet l’entreprise qui parvient la première à s’imposer sur son marché qui remporte tout. Le fait que LinkedIn investisse massivement pour s’implanter dans plusieurs pays lui a ainsi permis d’attirer des utilisateurs toujours plus nombreux. Ce cercle vertueux s’est transformé pour ses concurrents, Viadeo mais aussi son concurrent allemand Xing, en cercle vicieux, ceux-ci n’ayant pas eu la force de frappe financière pour résister.
L’autre illustration française de ce phénomène est, dans le non-coté, Dailymotion. Le site de vidéos en ligne a en effet été créé en même temps que le leader actuel du secteur, l’américain YouTube, en 2005. Au tout début, les deux sociétés ont bénéficié des mêmes atouts : levées de fonds d’amorçage de quelques dizaines de millions d’euros ou de dollars, recrutement de collaborateurs de talent… Mais, rapidement, YouTube s’est fait racheter par Google, ce qui lui a offert des marges de manœuvre financières colossales...